Passes d'armes, accrochages, geste douteux de Rossi, chute de Márquez . Le Grand Prix de Malaisie n'a pas été le spectacle attendu ; pire, chacun est parti de cette avant-dernière du MotoGP avec un sentiment de dégout. Mais que s'est-il passé avant et surtout après cet épisode ?
Rossi, l'un des meilleurs pilotes de l'histoire de la compétition moto, toujours tactique et calme, a perdu sa sérénité légendaire. Bien sur, en ne regardant que l'action, on trouvera son comportement dans le virage 14 franchement douteux. Mais revenons un poil en arrière. Lors de la conférence de presse du 23 octobre, Valentino a tenu un discours singulièrement vilipendeur envers son (ex-pote ?) Marquez. Un pavé dans la mare très éloigné des discours policés au sein de la galaxie du MotoGP – les choses doivent être propres et gentiment rester à leurs places. Beaucoup d'observateurs avaient fait le même constat que lors du GP précédent, le 93 semblant jouer un drôle de jeu, petite guêpe voulant piquer l'icône Rossi. Et de par la même favoriser le challenger au titre Lorenzo ?
Lors de la course d'aujourd'hui à Sepang, fans et détracteurs ont tous constaté que Marc Márquez a clairement laissé passer Lorenzo dès le début de la course. Ou plutôt n'a pas fait beaucoup d'effort pour partir à sa poursuite et jouer la gagne. Il a plus que démontrer qu'il en était capable lors de précédentes courses.
Mais c'est maintenant que ça coince. Une fois Lorenzo parti en chasse d'un Dani Pedrosa remarquable d'efficacité, Márquez a déployé une formidable énergie à emmerder Rossi. Le mot n'est pas choisi par hasard. Les premiers dépassements étaient magnifiques et annonçaient un combat de qualité, comme savent en mener les deux champions du monde. Rapidement, le duel s'est transformé en empoignade musclée, parfois dangereuse, jusqu'à ce que Rossi fasse un bref geste de la main. Signifiait-il que Vale voulait que Marc passe devant ? Que le jeu devait s'arrêter ? Une excuse pour un dépassement indélicat ? Un avertissement ?De toute façon, la tension devenait intenable et il fallait que ça clash. Rossi en avait marre, et sa trajectoire volontairement élargie devait mener Marquez soit à la faute, soit à une perte de temps pour lui foutre la paix. Márquez résiste et entreprend de bousculer Rossi. Il fonce, tente le forcing, veut s'imposer comme il a su le faire à maintes reprises. Rossi répond, la jambe bouge et la chute suit. Sportivement, ce n'était ni propre ni élégant. Humainement, il a mouché un jeune morveux qui avait besoin d'être remis à sa place. Mais nous ne sommes pas à la sortie d'un bar après une tournée de bières et quelques insultes.
Did you miss the #SepangClash between @ValeYellow46 and @marcmarquez93 in the #MotoGP race? https://t.co/45Xq7M4dsi
— MotoGP™ (@MotoGP) 25 Octobre 2015
Doit-on sanctionner l'attitude de Rossi ? Condamner le comportement pénible de Márquez ? La DORNA a fait un choix douteux. 3 points de pénalité et un départ en fond de grille pour Rossi lors du prochain GP. Et pour Marquez, dont le comportement de chien fou et son attitude en piste régulièrement agressive, que dalle. Son talent est indéniable, le jeune espagnol est prodigieux, et incisif : accrochage et chute d'Espargaro à Catalunya en 2012, le clash avec Kallio au Motegi, un passage en force sur Bautista au Qatar en début d'année, la mise HS du contrôle de traction de Pedrosa en 2013, contact agressif avec Lorenzo à Jerez en 2013, chute pour Corsi lors du dernier GP en Moto2… etc. Rossi n'est pas tout blanc non plus. Mais son noir palmarès est bien moins fourni.
La réaction du dessinateur Sato illustre le sentiment partagé par de nombreux fans de Rossi : La Dorna, firme espagnole, favorise "ses" pilotes.
La direction de course, ou la DORNA, ont analysé l'incident et annoncé un verdict très décrié par la communauté motarde ; les réactions fusent. Mais quel superbe cadeau pour Lorenzo et lui ouvrir une voie express pour le titre. Il y a clairement un parti pris. Dans quel but ? Dorna, une firme espagnole, aurait-elle un quelconque intérêt à ne pas sanctionner un pilote espagnol, immense espoir de la nouvelle génération, et favoriser le titre pour un autre pilote espagnol ? Tout ça au détriment d'un pilote italien ? Aurait-on voulu punir un pilote au charisme incroyable, supporté par un nombre incalculable de fans, d'avoir parlé trop fort et trop sec ?
Le coté politique est une chose. Mais l'ambiance qui règne actuellement dans le MotoGP n'est guère appréciable. Le comportement des pilotes d'aujourd'hui n'avait rien de celui de grands personnages de la moto. Marquez et Rossi ne s'entendent plus bien alors ils vont se fritter pendant la récré. Lorenzo n'a plus de copains, alors il va bouder et quitte le podium en plein milieu des célébrations. Seul Pedrosa continue à bosser comme un bon élève et se voit récompenser à la fin de la classe. Excédée, la maitresse décide de punir le vilain petit canard parce qu'il est d'un autre village. De grands champions à Sepang ? Surtout une bande de gosses incapables de se comporter avec maturité.
Rossi avait-il raison de pousser Márquez ? Non, ce n'est pas ça le sport. Méritait-il une sanction ? Oui, mais pas qui mettre en péril le titre et l'intérêt de la course. Marquez doit-il être aussi sanctionné ? Autant que Rossi, les deux protagonistes ayant tous les deux joués à être cons.
Personne ne ressort grandi de cet épisode.
Antisportivité vs réflexe incontrôlé