Essai de la DucatiDesertX 937 2024
L'aventure haut de gamme
Si la Ducati DesertX a la réputation d’être une vraie moto d’aventure avec sa roue avant de 21 pouces, il faut bien avouer que ce trail passe plus de temps sur les trajets du quotidien que sur les chemins d’enduro. Avec des Pirelli Scorpion Trail 2, on l’a testée sur deux jours et 600 bornes de petites routes en Haute-Loire, Ardèche et Lozère : le terrain de jeu parfait de cette meule et l’occasion pour Ducati de faire un clin d’œil à la récente version Discovery, une DesertX classique mieux équipée et affichée juste en dessous des 20 000 €.
Au premier coup d’œil, c’est bien une Italienne ! De ses deux feux diurnes ronds à la pointe de la boucle arrière, le style hérité de la Cagiva « Lucky Strike » en jette. Avec ses jantes à rayons tubeless et le coloris blanc avec des touches de rouge. Cette moto se démarque, et pas qu’un peu ! On a un faible pour la version blanche, mais la Rally avec son garde-boue haut façon enduro, elle nous fait de l’œil aussi… De toute façon on ne s’est pas privé pour essayer les deux.
Les commandes, les leviers réglables, les rétros, tout est nickel sur cette DesertX. Vu le prix, encore heureux, mais ça fait plaisir quand même ! Les protège-mains sont beaux, le sabot moteur fait le job pour protéger le moulin des cailloux, et les crash bars évitent de casser du carénage coûteux. Pour les plus bobo, on y accrocherait bien des sacoches souples. Mais pas nous, parce que notre test était exclusivement sur route.
Un moteur qui fait toujours vibrer !
937 cm³ de pur bonheur, qu’on vous dit. Ce bicylindre en « L » typique chez Ducat’, il envoie, même avec toutes les normes actuelles. Attention, faut pas être timide du poignet, sous les 3 000 tr/min, c’est pas des plus agréable, mais quand il monte jusqu’en haut du compte-tours, on se sent au guidon d’une vraie moto. La deuxième moitié des mi-régimes est vive sans te déboîter les bras, mais faut pas espérer une allonge de dingue. On passe les rapports au shifter (un peu accrocheur à bas régime) mais ultra-efficace dans les tours : Ducati, vous avez dit sport ?
Seul hic, ce moulin chauffe pas mal. Le sabot moteur protecteur et le rythme soutenu de cette « balade » entre journalistes n’ont pas aidé à garder le liquide de refroidissement sous les 80°C, voire sous les 90°C quand il fait chaud dehors. Résultat, ta cuisse droite, elle commence à griller, et on avait pas des températures caniculaires non plus. Il faut aussi dire qu’on peut se faire avoir par une poignée de gaz pas précise sur le filet de gaz.
Taillée pour la route, mais quand une roue de 19 pouces ?
Avec les Scorpion Trail 2, c’est un régal de prendre les virages avec le grand guidon qui te donne du bras de levier ! Déjà que les pneus d’origine - les bien connus Rally STR - accrochent bien, même sur l’angle, mais le profil routier des Trail 2, c’est la confiance assurée pour poser la bécane dans les virages dans une stabilité étonnante. Seul truc, la roue avant de 21 pouces alourdit un peu l’avant dans les pif-paf. Alors, quitte à perdre un peu en style, à quand une roue de 19 pouces sur la DesertX ?
Côté tenue de route, c’est du tout bon, mais la fourche a du mal à contenir les transferts de masse au freinage, même avec le réglage de compression au max. Ça donne un côté cheval à bascule, classique sur pas mal de trails à cause du débattement (ici de 230 mm). Le truc pratique, c’est que les réglages se font facilement avec un tournevis plat, et tu peux même ajuster ça sur le bord de la route avec la pointe de la clé de contact. La précharge, elle, se règle sur les bouchons des tubes avec une clé 6 pans qui n’est d’ailleurs pas dans le kit d’outils sous la selle… Un point en moins, tiens !
À l’arrière, c’est confortable, la retenue est correcte, et les mauvais revêtements ne font pas trop pomper l’amortisseur à bonbonne déportée pour mes 75 kg. Par contre si tu fais plus de 80 kg faudra lire un autre essai parce que les confrères un peu plus lourds que moi trouvaient que ça remuait un peu. Faut aussi dire que les réglages à l’arrière (compression et détente synchronisés) sont pas vraiment accessible sans outils.
Un petit tour sur les forums de Ducatistes confirme l’impression : les suspensions sont les premiers trucs à changer pour améliorer la moto. On l’a bien remarqué en essayant le modèle Rally avec ses éléments Kayaba haut de gamme. C’est aussi confortable, mais tout est beaucoup plus rigoureux. Ça te retient au freinage, le toucher de route est plus précis, et tu sens une connexion plus directe entre la poignée de gaz et l’adhérence du gommard arrière. D’origine, les Rally STR (chambres à air) sont montés sur les jantes Excel qui donnent un look plus tout-terrain.
DesertX : trail ou voyageuse ?
Le duo, c’est pas trop le truc de la DesertX. Si l’arceau qui sert de poignée est stylé, y’a pas beaucoup de place pour que le passager glisse ses doigts. Installé à la hauteur du pilote, le confort du passager dépend aussi de la selle. Bref, sans top-case ou dossier, c’est pas gagné pour voyager à deux sur la DesertX sans finir cassé.
Seul, par contre, ce trail protège bien, même avec une bulle qui paraît courte. En complément, tu peux opter pour la bulle touring qui servira surtout en hiver. Pour un pilote d’1m80, les jambes sont bien placées, mais après quelques heures une pause s’impose. Sur l’autoroute, le régulateur de vitesse est bien pratique. Au final, c’est une bonne voyageuse qu’on emmène sans souci dans des zones plus accidentées.
La capacité d’emport est vraiment variable. Faut dire que sa boucle arrière est fine, pas très pratique pour un gros sacs souple, sauf si tu ajoutes un porte-bagage ou une armature. Pour les plus aventuriers, un réservoir arrière est dispo pour augmenter de 8 litres la capacité du réservoir. Pas bête, mais faut passer à la caisse et lâcher 1 505,48 €. Pas forcément utile tant la conso du 937 cm³ reste raisonnable : en rythme de journaliste, les ordis de bord affichent 4,9 L/100 km et 5,1 L/100 km. À la pompe, on a calculé 5,1 L/100 km à une moyenne de 71 km/h et 5,6 L/100 km à 72 km/h, la faute à une séance photo sur une roue.
Au quotidien, on s’adapte !
Pas née pour la ville, la DesertX se faufile pourtant bien entre les bagnoles. Son gabarit fin la rend fluette et compacte, facile à manœuvrer. Ce qui coince un peu, c’est son assise haute et même si une option rabaissée existe, faudra évidemment sortir le porte-monnaie (367,20 €). Les moins d’1m80 devront s’adapter, mais rien d’impossible.
S’adapter à cette moto, c’est aussi accepter sa béquille latérale mal foutue. Trop verticale une fois déployée, on vérifie deux fois que la moto va pas basculer en descendant. Un défaut déjà corrigé par rapport aux premières versions, mais ça reste pas fameux. « C’est bien une italienne » me dit une petite voix. Des petits défauts qu’on apprend à accepter avec le temps.
L’avis Motoplanète : vaut-elle son prix ?
Maintenant dispo en version Discovery et Rally, la DesertX est aussi accessible aux permis A2 comme tous les modèles avec ce moteur Testastretta 11° de 937 cm³ (Supersport 950, Monster, Hypermotard 950). Le moulin développe entre 110 et 114 ch selon les modèles, mais chacun a une version 95 ch bridable à 47,5 ch.
Le tarif commence à 17 490 € pour la version blanche, et reste sous les 20 000 € pour la version Discovery. Même si la marque se veut haut de gamme, faut bien admettre que c’est le prix d’une moto bien équipée, mais avec peu d’options. Certes, elle est montée en Brembo, la finition est soignée, le moteur est top, et sa valeur de revente tient le coup, mais est-ce que ça justifie de dépasser les 15 000 € pour un trail de 100 ch ?
Côté alternatives, on pense à la (jolie) Husqvarna Norden 901, moins puissante mais moins chère, et bien sûr à la Ténéré 700, beaucoup moins puissante et beaucoup moins chère, mais qui reste une référence. Alors, pourquoi une DesertX ? Comme souvent, c’est le coup de cœur esthétique (et le portefeuille) qui décidera.
par Théo Duperret - Photos : Marine Roussel - Essense Studio