Motoplanete

La marque Motobecane (MBK)

En bref

Site web
Type de motos fabriquées Roadster
Pays d'origine France
Années de mise en service 1924 - 2017
Fermé

Millésimes

Localisation

    La première guerre mondiale est finie depuis quelques années et la France soigne petit à petit ses blessures. Les meurtrissures sont immenses mais la libération toute fraîche a fait naître malgré tout un sentiment d'euphorie. Le peuple a des souvenirs douloureux a jamais gravés dans son esprit et après être passé par le chaos, il se découvre peu à peu un goût prononcé pour la joie de vivre. Les morts sont comptés et les vivants se démarquent. Certains portent des noms illustres comme Joséphine Baker, Mistinguett ou Maurice Chevalier. D'autres, l'immense majorité, sont anonymes mais tous se reconnaissent dans cet élan de vie symbolique des années folles. Le pays se reconstruit...

    C'est cette année là que MOTOBECANE voit le jour par l'association de Charles BENOIT, Abel BARDIN et Jules BENEZECH à Pantin dans le 93.  Cette marque va fabriquer des modèles parmi les plus populaires de toute l'industrie motocycliste française (notons, par exemple la série des D45). Décortiquons un peu cette brillante épopée :

    1924 Sortie du premier modèle : la MB1 175 à courroie

    La bête est mue par un 175 cm3 deux temps. Pourquoi un modèle homme et femme/ecclésiastique? Parce qu'à cette époque dames et hommes d 'église portent des robes et, de ce fait, des modifications spécifiques sont de mise comme la couverture de la culasse pour éviter les brûlures mais aussi une grille de protection pour éviter toute prise de tissus volants dans les rayons de la roue arrière.

    Les premiers essais furent un succès et la réussite commerciale était au rendez-vous. Motobécane partait donc sur un bon pied pour commencer son histoire. Mais cette belle fondation qu'était la MB1 avait un défaut majeur: elle était seule, la marque ne disposant encore que de ce modèle à son catalogue. Le temps de la réflexion commerciale était venu.

    1926: une nouvelle venue dans la saga : MOTOCONFORT

    L'idée était toute simple : Il fallait développer un second modèle. Mais là, après cette Lapalissade, tout ce compliquait car si ce second modèle  devait être un échec, la jeune firme ne s'en relèverait certainement pas...

    La décision fût alors prise de créer MOTOCONFORT et de lancer de ce fait la MOTOCONCOFORT 308

    Cette décision à l'avantage suivant: si le nouveau modèle ne marche pas sur le plan commercial, cela ne nuira que peu à Motobécane qui est encore trop jeune pour subir un échec. Cela permettra aussi par la suite d'avoir deux marques, donc deux gammes, dont les principales différentes se situeront au niveau des coloris et quelques équipements mais tout cela au sein d'un seul et même groupe.

    1930: le bloc "B" et de fabuleux prototypes

    La machine est lancée. Il faut maintenant à notre firme son propre bloc moteur. Il se nomme : BLOC B. pour Motobécane et T pour Motoconfort.

    Le bloc B est le premier moteur entièrement conçu par Motobécane. Il s'agit d'un monocylindre décliné en plusieurs cylindrés (de 175 à 500cm3) et types (latéral et culbuté). Une des avancées majeures de ca bloc moteur est d'avoir la boîte de vitesse intégrée et non séparée comme cela était la norme à l'époque.

    La même année, trois prototypes sont présentés au salon de Paris. Il s'agit d'un moteur quatre cylindres en ligne de 500 cm3 latérales (B5) et 750 culbutés (B7). Les différences entre les deux modèles sont essentiellement mécaniques car elles se ressemblent comme deux gouttes d'eau.  Il y aurait même quelques exemplaires produits mais on n'en sait rien. En tout cas, même si c'est anecdotique, il faut avouer qu'elles sont sacrement belles!

    L'histoire continue. Comme toute marque qui se respecte, il faut aussi avoir ses lettres de noblesses en compétition. Nous somme alors en 1932 et une certaine course d'endurance appelée "bol d 'or" existe depuis dix ans. Cette année là, le vainqueur s'appellera Motobécane ainsi que l'année d'après en catégorie 500 et en gagnera d'autres au court des années suivantes. Notons qu'à cette époque, durant cette course de 24h, un seul pilote était autorisé. C'est donc lui qui disputait la course dans sa totalité !

    En 1934, la famille s'agrandit avec l'apparition des série "S" (sportive) et "R" (routière). Ces blocs moteurs sont vraiment emblématiques de Motobécane. Un bloc 4 temps culbuté ou latéral qui se déclinera en plusieurs cylindrées. Il est a noter que les blocs "S" et "R" se nomment respectivement  "M"  et "C" chez Motoconfort.

La gamme s'étoffe. La marque de Pantin grandit de plus en plus. Mais, au-delà des frontières, l'histoire se prépare. Nous sommes en 1939 et le ciel de l'Europe se prépare à s'obscurcir pendant six ans. La guerre éclate, le peuple se bat et la blessure qui semblait se cicatriser dans les années 20 avec l'aide des années folles s'ouvre à nouveau dans un fracas qui raisonnera sur la terre et dans les esprits pendant des générations. Là, le journaliste moto se tait et laisse l'historien parler à sa place...

...La guerre est passée sur l'Europe. Les plaies sont encore ouvertes. Pourtant, si les livres retiennent cette date comme celle de l'armistice, elle est aussi un tournant dans l'histoire de la moto avec l'apparition de la D45.

La D45 est une 125 qualifiée de populaire. On parle dans le milieu des collectionneurs de "125 popus". Cette moto se nomme en réalité D45A de 125 cm3 trois vitesses à mains au réservoir avec des soupapes latérales. Au cours des années suivantes, elle devient D45B (avec, entre autre, un vilebrequin modifié) pour enfin devenir la D45S ( "S" pour suspensions, les deux premières étant munies de cadres rigides).

    En 1946, la série "Z" voit le jour. Si les D45 étaient des 125 latérales, les "Z" sont elles des 125 et 175 culbutés.

    Ces machines, d'une beauté simple et bienfaitrice, participeront au déplacement de beaucoup de personnes. On en trouve de partout. On peut même entendre parfois qu'elles sont à la moto ce que la 4cv et la 2cv furent à la voiture: un engin populaire et fiable. Il y a fort a penser que, dans les décombres d'une Europe qui se remet de son dernier conflit, de nombreuses de ces machines ont circulé sur des routes vers la voie du lendemain et ce, malgré une conception assez avant-guerre.

    Les "Z" resteront au catalogue de 1946 à 1964 soit 18 ans d'existence. Un bel exploit! Les séries "D" et "Z" sont un véritable emblème de la démocratisation de la moto de petite cylindrée et de bien belles pièces pour les restaurateurs et collectionneurs en herbe !

    En 1949, Charles Benoît & Eric Jaulmes présentent la fameuse MOBYLETTE (contraction de "mobile" et "bicyclette" ) Sympathique et emblématique vélomoteur qui dépassera largement nos frontières et sera connue à travers le monde et à travers les âges.

    Comment continuer sans s'arrêter un peu sur cet objet mythique. Dés 1955, on sort le millionième exemplaire. Dans cette France d'après-guerre, les gens ont besoin d'un moyen de locomotion fiable, économe et pratique. La mobylette remplit pleinement cette fonction. On en trouve partout. La cylindrée est de 49 cm3 pour une vitesse max de l'ordre de 30 km/h. L'évolution de cet emblème se fera surtout sur deux points: Le design (qui évoluera au fil du temps) mais surtout l'embrayage. En effet, les premiers modèles étaient simples à ce niveau. Puis, au fil du temps, l'embrayage et la transmission automatique évoluent pour arriver à ce qui se fait maintenant à savoir un système d'embrayage centrifuge couplé à un variateur de vitesse.

    Pourquoi parler d 'un 50 ? Tout simplement parce que ce petit vélomoteur a permis à la firme de survivre après la guerre et à perdurer aussi longtemps dans l'histoire. Son succès peut tout simplement être qualifié de mondialement historique. 14 millions d'exemplaires ont été produits. Voilà un chiffre qui parle de lui même...

    En 1951, la production est délocalisée de Pantin à Saint-Quentin.

    L'histoire continue. Histoire de la marque bien-sûr mais aussi et surtout, l'histoire avec un grand "H". Nous sommes dans les "trente glorieuses" (pour rappel cette période se situe de 1946 à 1975). Durant cette période faste, l'automobile est en pleine démocratisation. De par le fait, la moto, elle, est un peu reléguée au rang d'objet de démarcation sociale utilisée soit par ceux qui n'ont toujours pas les moyens de rouler en voiture, soit ceux qui sont plus en marge de la société classique. Pourquoi rouler en moto alors que l'on peut avoir de plus en plus la possibilité de rouler au sec et au chaud dans l'habitacle d'un quatre roues ?

    Cette question est vraiment centrale. En effet, si aujourd'hui, nous motards, nous pouvons nous targuer d'aimer le vent, parfois la pluie ou le froid bref, de voyager dans des conditions un peu rudes, souvenons-nous qu'à cette époque, dans les années 50, la guerre est finie depuis peu de temps seulement et, après cette période rude pour nos anciens, on peu aisément les comprendre, quand ils en avaient la possibilité, de vouloir un peu plus de confort. Les hommes fabriquent les marques mais c'est souvent l'histoire qui en détermine leur destin.

    1969: une année phare...qui baisse d'intensité...

    Motobécane change de direction avec l'accent mis sur le moteur 2 temps. Cette année là est présentée la 125 standard. Alors là, on est à l'opposé de ce qui a était fait par le passé. Une 125 deux temps bicylindres avec de très nombreuses innovations techniques. Cette 125, de part ces caractéristiques techniques, a tout pour plaire oui mais...

    Oui mais voilà, quelques années avant, venant de l'Est,  arrivait dans l'hexagone, une horde japonaise aux atouts implacables et il est évident que même avec toutes les avancées techniques du monde, une 125 deux temps n'est pas de taille à rivaliser avec un quatre pattes quatre temps aussi puissant que beau. De plus, le fait que la moto ne soit plus utilitaire mais bel et bien devenue une faiseuse de sensation, la 125 deux temps en trouvera pas vraiment son public. L'innovation technique était le phare mais la lumière passée s'éteint peu à peu dans la nuit des années 70 et ce, malgré l'arrivée d'une 350 deux temps, toujours bicylindre, en 1973.

   ...Et qui s'éteint:

    La lumière baisse de plus en plus pour Motobécane qui ne parvient pas à trouver son public. On imagine assez bien les réunions des dirigeants et ingénieurs essayant de trouver une réponse à ce qui semble être de plus en plus inévitable. Peut-être même y a t'il eu des empoignades verbales et des désaccords poignants qui doivent encore résonner dans les mûrs...Seuls ceux qui ont vécu cela pourraient nous les confirmer... ou pas...

    Les planches à dessins ont dû garder bien des secrets et les crayons auraient peut-être bien des choses à dire mais l'histoire est en marche et les éclats du passé baissent de plus en plus d'intensité pour ne plus qu'être une lueur. La flamme va bientôt s'éteindre sur cette entreprise qui, de part son histoire, a contribué à l'histoire, peut-être pas d'un pays, mais au moins de ses habitants...

     En 1981, le dépôt de bilan est prononcé. A partir de ce moment là, Motobécane n'est plus. Mais l'esprit de la marque ainsi que l'usine de Saint-Quentin resteront présents avec le rachat de la firme par Yamaha en 1983. MBK venait alors de naître.

    On ne peut qu'être triste de la disparition de ce fleuron. Pourtant, malgré les difficultés à négocier le virage de la nouvelle ère, cette marque restera longtemps présente dans les esprits. En effet, on a tous un père ou un grand-père qui a roulé sur une D45 ou on a tous vu et très souvent même conduit une mobylette.

    A vous qui verrez un sigle MBK de nos jours, rappelez vous d'où tout cela vient. Qui sait, en regardant dans le rétroviseur, vous verrez peut-être une Z2C vous saluer d'un appel de phare blafard avant de disparaître dans la nuit de l'histoire. Si à ce moment vous sentez un peu de nostalgie, c'est que tout cela n'aura pas été fait pour rien...

*Droits, sources et copyright

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