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ActualitéImmersion dans le 38ème Trèfle Lozérien.

Immersion dans le 38ème Trèfle Lozérien.

            Et voilà, Josep Garcia vient de remporter le Trèfle Lozèrien 2024. Pour la troisième fois, le pilote espagnol a gravé son nom sur les terres du Gévaudan. Face ou derrière lui, des internationaux prestigieux, des anonymes, des amateurs, des gens du coin ou de loin. Mais tous animés par une passion de l'enduro communicative et intense. Le podium clôture trois jours de course, soutenus, sources de performances, de défis et parfois de boue dans les yeux. Mais avant, il y a le départ de son foyer la veille au soir pour certains, des semaines pour d'autres.

TREFLE LOZERIEN 2024 - Belle humeur dès le départ

            Entre les camions, les motos et les hommes, l'effervescence est contenu et pourtant palpable. Les rues de Mende sont encombrées à souhait, laissant le hasard garer les véhicules et les pilotes croiser leurs regards. Ils se reconnaissent, se saluent, se respectent, et parfois ignorent que la KTM ou la Husaberg à coté d'eux sera piloté par un italien ou un canadien. Ils se préparent, s'habillent et comment ne pas avoir une pensée toute particulière pour cette équipe venue d'Ukraine. Ou encore pour cet anglais aux yeux pétillants de passion, engagé avec son Husvarna 430 2-temps de 1982 la vénérable dame et son meneur finiront en milieu de classement, à la 342ème place. Pas mal pour une moto plus vieille que la majorité des participants.

            Il est bientôt 8 heures. Dans quelques minutes, les 576 motos (plus une cinquantaine d'invités) vont s'éveiller les unes après les autres. Le grand parc fermé est comme un gigantesque paquet de bonbons pour tout amateur d'enduro. Ils arrivent, devisent dans le petit matin épargné par la pluie, s'encouragent au milieu de souvenirs des éditions précédentes puis s'en vont au-delà des contrôles et des barrières. L'homme rejoint la machine, la machine attend l'homme, les deux calculent la journée à venir avant de s'élancer. Car de l'instant de leur départ sera déterminée la fenêtre temporelle où ils devront valider leurs passages dans les CH. Trop en avance, il sera nécessaire d'attendre ou subir une pénalité (du temps en plus sur leur résultat). Sur les épreuves de ce genre, la régularité compte autant que la performance.

TREFLE LOZERIEN 2024 - Plus de 600 motos dans le parc fermé et surveillé

            Quatre de front, ils patientent sous la harangue du speaker. L'attente n'est pas longue mais fiévreuse. Un petit coup de botte, la roue avant qui descend de l'estrade, un ronfle de moteur et c'est parti. Chacun, tous, individuel ou en groupe, s'élancent pour 200 bornes d'aventure.
Ou seulement 30 mètres la malchance peut frapper dès le début. Un jeune participant encaisse l'amertume d'un problème de sélecteur. Rageant, et injuste. C'est la loi du sport.

            L'envol des "Tréfliens", par clapotis réguliers et trépidants, est suivi rapidement par une myriade d'engins d'assistance (voitures, motos, camions, quads, vélos). L'espacement des départs permet d'éviter un encombrement monstre qui finira par se manifester tôt au tard. Grâce aux intervalles, les départ s'étalent sur deux heures et demi, assurant un flux long et continu de compétiteurs. Un régal pour les spectateurs, assurés de voir des bécanes, des pilotes, de l'adrénaline et du show sur chaque spot pendant des heures.

TREFLE LOZERIEN 2024 - A l'attaque dans les spéciales

            Les routes de Lozère sont ainsi les témoins d'une caravane de véhicules en perpétuelle mouvement, ses segments se posant et repartant inlassablement, telle la mue continue et évolutive d'un insecte ravitailleur. Ainsi, sur chaque Contrôle Horaire et chaque SPéciale, un village se crée sous la préséance du staff de l'organisation. La coordination est exemplaire, témoignant d'une préparation et d'une expérience bien rodées. Mais le capharnaüm est aux aguets, prêt à fondre sur les camions au moindre couac. De la part du staff, ayant mal calibré les lieux ? On ne peut évincer quelques ratés inconditionnels, comme cette propriétaire de gite informé très tard d'un CH à quelques centaines de mètres de son établissement. Bien des véhicules se sont retrouvés coincés et coinçant devant (dans) sa propriété. Mais cela se serait-il produit si tout le monde respectait le Trèfle ? La veille ou le matin même, des actes de malveillance précédaient l'évènement : de l'arrachement de panneaux et d'indications mettent à mal le fonctionnement de l'assistance itinérante. Evitions les amalgames mais pointons du doigt les rares mais acariâtres débiles brandissant le sceau de l'écologie pour évacuer leurs hostilités égoïstes.

            Pendant ce temps, les motos bourdonnent à bonne allure sur les liaisons. Il faut rapidement s'investir dans le mouvement, car les chemins emmènent promptement les pilotes vers du complexe. Des cailloux roulants et autres aspérités envoient assez vite les premiers coups de raquette. Pour les expérimentés, la situation devient joueuse. Pour ceux du niveau intermédiaire, il faut un temps de chauffe, d'adaptation, et affronter du technique assez vite. Le Trèfle impose ainsi rapidement sa marque : ce sera beau mais exigeant, accessible mais pas novice. Non seulement il ne faut pas lambiner dans les passages aguerris mais aussi être rapide et efficace sur l'ensemble de la liaison pour ne pas être à l'agonie sur le timing. Tout ceux imaginant de la balade temporisée de spéciales musclées se trompent ; le Trèfle Lozérien est une course, dès le début !

TREFLE LOZERIEN 2024 - Antoine Meo sur Ducati DesertX

            Entre le chrono, les sentiers et les crampons, le guidon s'estompe souvent de l'esprit pour apprécier des panoramas saisissants. Des décors magnifiques sont tout autant la toile de fond que le spectacle vivant déroulant ses grâces. Une émergence d'envies contradictoires où tout pousse à s'arrêter quelques instants pour absorber la splendeur environnante alors que la pendule file. Voir et foncer, tourner la tête, contourner l'arbre, revenir vers la grandeur des gorges puis avaler l'obstacle. La moto et l'enivrement se confondent.

            Les kilomètres s'égrènent jusqu'aux spéciales. Les premiers arrivés assurent tout de suite le spectacle. Le public est proche mais prudent, appréciant autant les effluves gazeuses des 2-temps que les projections de boue dans les oreilles. A ce jeu, Antoine Meo n'est pas le dernier. Engagé cette année sur une Ducati 900 DesertX, le célèbre numéro 200 s'est montré à la fois joueur, technique, bûcheron et show-man. Impossible de le louper avec sa grande cape de trappeur, son gabarit impressionnant et sa bonne humeur débordante.

TREFLE LOZERIEN 2024 - la Suzuki V-Strom 800DE engagée par Tom Barrer

            De nombreux autres personnages de l'enduro étaient présents. On ne peut tous les citer, mais focalisons sur Tom Barrer et sa Suzuki V-Strom 800DE, les frères BAS de KTM Grenoble avec un Jérôme revenant tout juste d'une opération du bras, Johnny Aubert au guidon d'une 890 Adventure R, la remarquable performance de Rose Alegre-Roumec, le pilotage musclé de Julien Gauthier, le redoutable Jérémy Tarroux, la présence du très prometteur savoyard Mikael Doyelle (épaulé par l'ancien pilote de vitesse et d'endurance Aurélien Bernicot) et tant d'autres méritant un coup de chapeau et/ou de projecteur.

            Au début de chaque spéciale, la terre n'a pas encore connu le martelage des crampons. Et si elle va en recevoir plusieurs milliers en quelques heures, elle ne se laissera pas faire. Avoir du métier et un bon bagage technique est impératif, ne serait-ce que pour ne pas être rapidement dépassé par le tracé. Le chrono est maitre, les minutes intenses, la difficulté certaine. Avec beaucoup de dévers sur certaines spéciales, il fallait plus que maitriser l'embardée de la bécane. Nombre de pilotes ont vu quelques clôtures de très prés.

TREFLE LOZERIEN 2024 - passager clandestin ?

            La ligne d'arrivée enchainent vite sur la prochaine liaison. Derrière, les équipages débarquent régulièrement sur les lieux du défi ; et fatalement le nombre grandit. L'attente commence alors ; faire couler du gravier dans un sablier, cela demande un peu ou beaucoup de patience pour ceux qui arrivent en haut de la clepsydre. C'est sans compter sur la ferveur des spectateurs et la qualité de l'épreuve, ayant vite fait de maintenir la joie entre le guidon et le casque.
Au soir du premier jour, les motos retournent au parc fermé après de brèves révisions ou quelques réparations, une douche et du carburant. Même traitement pour les pilotes, qui se coucheront tôt, un brin fatigués mais pas fourbus.

            Samedi matin, à quelques centaines de mètres de la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Privat, tout le monde est à nouveau impatient d'entendre les 8 hrs. Le petit village itinérant se met en route mais rapidement, quelque chose annonce une journée différente. Le parcours, bien sûr, mystiquement identifié sur les traces de la Bestia, la bête du Gévaudan . Qui se révèlera au fur et à mesure plus corsé, plus technique que celui de la veille. Mais le plaisir et l'homogénéité sont toujours aussi bien calibrés.
Ce qui a changé, c'est le nombre de spectateurs. Beaucoup plus présents, du tout petit au grand-père de 80 ans qui levaient la main. Un moment intergénérationnel, avec une communion presque palpable entre les gens et les enduristes. Nos envoyés spéciaux sentaient l'allégresse et les sourires tout le long des liaisons.

TREFLE LOZERIEN 2024 - Du technique à tous les étages

            Le Trèfle révèle alors complètement une grande vertu : son coté populaire. Chose qui tend à disparaitre exponentiellement. Autant que les pilotes, le public est à l'honneur sur cette épreuve. Nul besoin de prendre un billet à 150 balles pour vibrer au son des mécaniques et des ornières. Comme sur les meilleurs moments d'un Tour de France, les fans et les curieux de tout âge viennent apprécier l'événement, qui est partout : au détour d'une route perdue, en plein milieu d'un champ, à l'intersection d'une rivière ou à l'entrée d'une forêt. L'un de nos pilotes pratique la discipline et les épreuves depuis 20 ans ; c'est ici qu'il a constaté le plus d'engouement de la part du public. Et de loin ! Un sentiment de ferveur et de partage que l'on ne retrouve quasiment plus, porteur d'une énergie galvanisant les pilotes.

            205 km sont au programme. Chaque journée aborde un kilométrage de même amplitude, avec une difficulté plus importante que sur la première. La fatigue ne joue pas encore de rôle dans cette histoire. Le niveau monte d'un cran, avec des passages très complexes (mais franchissable), usant plus sérieusement les organismes sans toutefois émousser l'enthousiasme général. Les erreurs sont plus présentes, les chutes plus nombreuses, et si le temps initialement prévu comme épouvantable s'est finalement montré plutôt clément, quelques averses ont rendu certaines portions plus compliqués pour certains. Avec plus ou moins de chance, tu revenais à la place du Foirail soit partiellement couvert de boue, soit complètement blai.

            L'organisation a bon ton de capitaliser sur l'allégresse locale en garnissant la fin de l'après-midi avec quelques animations, des séances de dédicaces et une petite envolée de cadeaux au sein de la Fan zone. Pour les minots comme les plus sérieux, c'est l'occasion de croiser et d'échanger avec quelques champions dans la plus grande simplicité. Avoir 10 ans, rencontrer un International et checker avec lui, n'est-ce pas énorme et magique !?! Ni les réseaux sociaux ni l'argent ne peuvent prétendre offrir autant.

TREFLE LOZERIEN 2024 - Promenade forestière

            Mende, troisième jour. Ca tire déjà plus dans les épaules. Synthol et arnica s'invitent entre le petit-dèj et l'habillage. Ce matin sera moins soft pour les concurrents moins aguerris. Car l'ordre de départ est inversé. Les numéros 600, jusqu'ici lâchés vers 10 h 30, se retrouvent sur la grille de départ à 7 h 30. Hhuummm, la joie de se tirer du lit avec de bonnes courbatures et monter sur la brêle avec le café qui n'a pas encore réveillé le cerveau Ce petit privilège permet dapprécier les senteurs matinales et des pistes encore toutes fraiches. Du coup, les top pilotes arriveront deux heures après sur du terrain déjà bien travaillé, redéfinissant le niveau de difficulté pour eux. En les voyant voltiger dans les enchainements et les pièges, il semblerait que cela ne les affecte guère.

            Tant mieux, car il leur faudra encore du jus pour conclure ce gros week-end. Les 30 premiers du classement participent au trophée Thierry Castan. Une dernière course, typée cross, dans un circuit éphémèrement installé dans le champ de la Favre. Les hauteurs du terrain sont prises d'assaut pour apprécier comme il se doit les manches spectaculaires et intenses. La cerise sur le gâteau, pourrait-on dire, sauf qu'il serait plus prescrit de parler de trèfle à 4 feuilles. Là aussi, Josep Garcia impose sa marque et remporte le trophée. Une domination complète pour le pilote KTM Farioli.

TREFLE LOZERIEN 2024 - Trophée Thierry Castan

            Pourquoi ce nom de Trèfle ? L'épreuve est constitué de trois boucles, toutes partant de Mende, dessinant topographiquement la forme de cette plante fabacée. A l'issue de cette 38ème édition, quasiment tous sont prêts à revenir l'an prochain. Quelques-uns sont prêts à faire l'impasse, pour laisser de la place à la nouvelle génération.

M.B - Photos E. Bellefin / Julian Gaillard

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