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ActualitéBol d'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d'un renaissance.

Bol d'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d'un renaissance.

   Suis-je un vieux briscard pour porter un regard amer sur Magny-Cours et m'asseoir de félicité entre les pins et les vibreurs du Castellet ? Certainement pas. A quelques mètres, dans le creuset de la compétition, Zon et Kink comptent 30 Bols à leur actif. 25 en tant que spectateurs, 5 en tant que membres d'équipe. Et ils ne reviendront pas de l'autre coté. Quand on a gouté à l'Endurance, on ne s'en désintoxique pas. Et puis, ils ne retrouveraient pas le Bol qu'ils ont connu autrefois, le sauvage, le cocktail d'acier et d'alcool, celui où les RVF et ZX-7R vrombissaient pas si loin  du monde de Mad Max.

   Le retour au Paul Ricard fut plus qu'un instant de nostalgie et de promesse. Il fut accueilli comme une bénédiction, un retour aux sources... mieux : une évidence. Le Bol d'or s'était perdu dans les brumes de Magny-Cours, souffrant d'une lente hémorragie de visiteurs. Le tableau n'est pas totalement noir, mais nuancé de gris, et de quelques couleurs. Surtout du bleu et blanc, avec la domination des GSX-R. Puis du vert quand Kawa s'est vraiment investi dans l'aventure avec la dernière mouture de sa ZX-10 R. Mais qui applaudissait ? 10 000 spectateurs seulement la dernière année, peut-être moins. Et le changement de calendrier (quand le bol et le Mans ont inversé leurs dates en 2011) avait élargi la plaie qui frappait cette épreuve. Une connerie immense, il n'y a pas d'autre mot. Déjà que ce n'était pas gai de se réveiller dans le frais des septembre de la Nièvre durant la première décennie du XXIeme siècle. C'était une hérésie de plonger le public dans la froideur d'avril. Les organisateurs se souviennent-ils du 4° sur le thermomètre un matin de 2014 ?

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.Le Bol d'or à Magny-cours - fin d'une agonie

   Oublions ce billet acide, que certains justifieront de leurs souvenirs, par le délicat soleil du sud et sa caresse sur l'exceptionnel site du Castellet. Ou plutôt, du H.T.T.T (High Tech Test Track) Paul Ricard. Un circuit totalement modernisé au début de la décade précédente. Les anciens avaient quitté un vieillissant tracé, au passé glorieux. Ils reviennent dans une oasis de technologie et de saveurs. Une fois passé le péage d'entrée, Paul ne sent plus le Ricard. La départementale maculée d'asphalte impeccable serpente gentiment dans l'enceinte, longeant un petit lac où l'hydrospeed amuse le chaland. A droite, un camp dédié au Bol d'or Classic. Là attendent sagement des Laverda, Godier-Genoud, RC 30, 916 et CB 1100 R. A gauche, un aéroport... où siesteront des milliers de bécanes le samedi et dimanche après-midi. Impressionnant ! Magique ! Plus loin, la course, la ligne droite du Mistral, la plongée dans les Signes, le Bol !

   Le Ricard a bondi dans le temps, et il fait forte impression. C'est vaste, élégant, propre, presque précieux. Mais face à la ligne droite des stands, on se demande comment le public va pouvoir assister dignement au départ. Les gradins ont-ils oublié de manger de la soupe pendant leur croissance ? Non, du tout. Quand le Paul Ricard fut modernisé, son nouvel objectif fut de servir de piste d'essai aux "Formule 1". Du coup, les spectateurs n'ont aucunement été prévus dans le cahier des charges. Alors, quand la piste s'est ouverte à la compétition il y a quelques années, on s'est doucement préoccupé de caser du monde par ci par là. Du coup, quand le Bol d'or est revenu avec ses 74 000 spectateurs, le phénix n'avait pas de quoi poser tout ce monde. On lui pardonnera cet écueil parmi d'autres. Car c'était un renouveau, car le spectacle fut là, car tout le monde y a cru, et veut y croire pour demain, pour les éditions précédentes.

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.Départ du 79ème Bol d'or - Circuit Paul Ricard

   Il est 15 hrs. Le drapeau tombe, les pilotes s'élancent, les cris et encouragements accompagnent les bottes des pilotes qui se précipitent vers les ZX-10R (en nombre), GSX-R, R1 et CBR - une R7 est présente pour le clin d'oeil, une Ducati Panigale pour la différence, la Metiss pour confirmer son exception. Ça encourage, ça crie, ça croit, ça hurle, ça court, ça vit !!! Et tout se précipite dans le tonnerre, dans cette rage de moteurs si spécifique quand toutes les mécaniques démarrent et s'envolent vers un martyr de 24 heures. Nous sommes samedi 19 septembre 2015, et chacun s'attend à tout.
Ce ne sera pas long avant que la dimension ne change. Avant le deuxième tour ! Les top-équipes, surtout deux, savent toute la mesure de l'enjeu : le titre de champion du monde se joue ici ; peut-être même avant la fin de la course avec le système de points intermédiaires. Méliand doit assurer, Guyot doit tout donner et se surpasser. Mais comme l'a dit Shakespeare, on trébuche quand on se précipite. 15 h 02, David Checa se flanque un volume dans le dernier virage. Tout le monde est stupéfait. Et instantanément, le rapprochement se fait avec une chute très similaire du même pilote, à la même période l'an dernier lors des 24 heures du Mans. A cette seconde, le GMT 94 vient de perdre le Bol. Mais pas l'honneur, bien au contraire. La R1 n'est pas faite que d'alu et de watts ; elle n'est que le tranchant d'une équipe réputée pour son efficacité et son excellence dans le défi. Après une réparation éclair, la moto retourne au combat en 53ème position. Le challenge est immense, et il faut trouver une motivation exceptionnelle pour tenter de reprendre tout ce terrain perdu. Le titre est hors d'atteinte, la victoire quasi impossible. Mais Guyot, ses pilotes, son équipe vont cravacher au-delà du scepticisme. S'en suivra une remontée fantastique, comme seuls les grands noms de l'Endurance savent le faire. Au bout de 6 heures de course, le GMT 94 est 10ème. A la mi-course, 5ème. 20 heures après l'incident, le team pointe à la 2ème place, qu'il ne quittera plus jusqu'à l'arrivée. Une performance qui impose le respect

   N'oublions pas la chance dans cette histoire. Ou plutôt la malchance pour certains. Le circuit est exigeant, même cruel pour les mécaniques dans cette interminable ligne droite du mistral. Les moteurs restent à pleine charge pendant près de 22 secondes, emportant les missiles dans des vitesses hallucinantes. Le record de vitesses est digne des MotoGP, avec une pointe de 352,9 km/h pour la Yamaha R1 du 3ART Yam'Avenue. Incroyable ! Mr Gaby, quel est votre secret pour préparer ces motos ? L'équipe #36 ne se contentera pas de ce shoot de vitesse et signera une superbe 8ème place à l'arrivée. Au sein de l'équipe, on sait rire quand les outils sont posés ; on est exceptionnellement professionnel quand on les reprend. Et le résultat est là. Pendant une courte visite au box du team, le matin du départ, je salue Sylvain et Benjamin Ré, deux frangins qui ont grandi dans mon quartier. Encore hier, l'Endurance Mondial n'était que des photos inaccessibles sur papier glacé. Ils sont entrés par la petite porte, nous accompagnant sur les manches du championnat de France d'Endurance. Aujourd'hui, les voila à tutoyer et même poursuivre les meilleurs pilotes du monde de la discipline. Le parcours est beau, et peut servir d'exemple. A tous ceux qui rêvent de connaitre les rouages du milieu et faire partie, faire vivre le spectacle, il suffit de se lancer et de bosser, parfois durement, pour être l'un des acteurs des plus exigeantes courses du monde.

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.Le team 3ART Yam'Avenue

   Je vous parlais de malchance. Une donnée hélas indissociable de ce genre d'épreuves. En témoignent la chaine pétée pour Yamaha #36 citée précédemment, à moins de 3 h de la fin de course. Même sanction pour la BMW S 1000 RR semi-officielle #13 du Penz BMW Motorrad France. Du retard comme punition, mais elles finiront la course dans le Top 10.
Les moteurs ont tenu bon, sauf celui de la Honda #111 en fin de matinée dimanche. La CBR rend l'âme alors qu'elle jouait la gagne sur ce 79ème Bol d'or. Moteur fusillé également pour le Racing Team Sarazin #66 ce matin-là ; pour le YART deux heures plus tôt. D'autres têtes d'affiches ne verront pas le drapeau à damier : le Junior team, grand favori de la catégorie Superstock, National Motos, Bolliger... 18 équipes seront les jouets de la fortune sous le soleil du Var.

   Et Méliand, où est-il dans cet opéra ? En chef d'orchestre, comme toujours. Détendu et enjoué, l'homme aux 13 titres mondiaux vaque avec légèreté avant la course, aux cotés d'une GSX-R 1000 vieillissante mais toujours efficace. Elle arbore ce week-end les mêmes couleurs que la GS 1000 R de 1980 trônant fièrement à ses cotés, celle qui a offert au S.E.R.T sa première victoire il y a 35 ans. Il en sera tout autrement entre 15 h et 15 h (le lendemain). Pendant la course, tout ne se passe pas comme prévu. La moto rentrera plusieurs fois aux stands pour divers soucis. Principalement, et officiellement, au niveau du bras oscillant. Le « chef » sait que tout peut se jouer en un instant. Pendant la course, il est tendu ; chaque ravitaillement est mené quasi militairement, avec une efficacité redoutable, des ordres rapides et précis, un ballet millimétré et chronométré avec la supervision de l'homme le plus expérimenté du plateau. Chaque seconde vaut de l'or ! Les hommes de Méliand le savent, la tension est palpable entre chaque geste. Les appareils photos crépitent à chaque arrêt, suivi par quelques butinages de micro. Dominique répond poliment, avec des phrases calibrées et opérantes ; Méliand pense à la pendule, seul élément qui ait une emprise sur lui. Enfin, au bout de 24 h et une troisième place sur le podium, elle le libère pour lui accorder son 14ème titre de champion du monde d'Endurance. Le chrono et le "Chef" se sourient, se respectent, et se quittent en bons termes ; pour l'instant. Ces maitres du temps se retrouveront bientôt pour un nouveau bras de fer.

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.Dominique Méliand, team-manager du Suzuki Endurance Racing Team

   Toujours discrète de faits d'armes et superbe sur les Bols qu'elle a conquis, la Kawasaki SRC #11 ajoute à son étagère de gloire un trophée exceptionnel. La victoire pour la renaissance de l'épreuve au Castellet. La ZX-10 R a manqué de succès cette année, rompant avec une domination écrasante depuis un lot de compétitions impressionnant. L'équipe de Gilles Stafler n'a rien lâché, et offre à Kawasaki le 79ème Bol d'or. A 1 600 kilomètres de là, en Superbike Mondial, Jonathan Rea a  donné au constructeur le titre de champion du monde WSBK 4 heures avant. Carton plein pour les verts sur la scène mondiale.

   Les spectateurs étaient au rendez-vous, nombreux et avides de découvertes. L'organisation avait prévu de quoi les divertir copieusement. La course bien sûr, et aussi différents spectacles et exhibitions. Concerts et fête foraine n'ont pas fait un bide mais... le public n'a pas mordu. Toujours un sujet de discussion délicat, la restauration. On se contentera de rappeler les tarifs exorbitants pour des sandwichs à la qualité et au gout aléatoires. Plus loin, au camp de la Pinède, une autre partie, un autre visage du Bol se dessine. C'est là que beaucoup de choses ont changé aussi. Les questions immédiatement reviennent devant les yeux : les fous sont-ils de retour ? Quels engins surréalistes va-t-on trouver ? Quelle quantité de viande saoûle beuglera dans quelque allée ? Le monde de Mad Max est-il à l'appel ?
Non, il n'en est rien. Le côté sombre du Bol n'est pas là. On se promène tranquillement dans le camp, rapidement conscient qu'aucune tronçonneuse ne viendra traverser la route toute seule. De temps en temps, on observe quelques victimes d'apéros chargés mais pas extrêmes. Un rupteur par ci, un moteur éventré par là, un banc de puissance opérant à la distraction du peuple en plein milieu du cantonnement. C'est sage, très sage par rapport à la folie d'autrefois. Et c'est jeune. Où sont les vieux blousons noirs Furygan et Segura tannés par le temps et les relents d'huile ? A chaque carrefour, les couleurs vives et les bottes impeccables semblent sorties du magasin. Ni moustiques ni boue et peu de kilomètres sur ces tenues. On se croirait à la sortie des moto-écoles. Et cela fait plaisir ! La relève est timide mais elle est là. Elle ne semble pas avoir été façonnée par l'esprit, par l'expérience des anciens. Comme si le bâton-relais s'était perdu entre deux générations. Ils découvrent, ils rient, ils postent sur Facebook et Instagram ; mais ils n'ont pas envahi la piste à l'arrivée. L'enthousiasme était là lors du podium mais pas vibrant, ne secouant que sommairement les tripes. Laissons-leur le temps. L'année prochaine, ils sauront.
 Et beaucoup se sont plains du manque de sanitaires. Laissez-moi sourire. Bien que l'organisation doive faire encore un réel effort à ce niveau et rajouter plus d'espaces de soulagement, les mauvaises langues n'ont pas connu Magny-cours. La promenade du dimanche nous a dévoilé des rangées de WC propres et debout ; dans la Nièvre, les blocs de commodités étaient ravagés dès le vendredi après-midi, retournés le soir... et je n'en dirai pas plus sur le lendemain pour ne pas donner des idées hallucinatoires et anticipatrices.

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.Une petite partie du camp

   Une première plus qu'un retour au Castellet pourrait-on penser. Niveau sécurité, beaucoup reste à faire. L'accès à la ligne de départ pour le staff technique est particulièrement inadapté. Impossible d'accéder ou d'évacuer correctement la piste : comment faire transiter rapidement 500 personnes par un passage large comme une porte ? Les gars, faut faire une grande ouverture avec un portail ! Les jolies bandes bleues et rouges remplacent les bacs à gravier. C'est joli, ça claque en photo aérienne, et ça esquinte les motos et les hommes sensiblement plus que les petits cailloux. Méliand n'a pas manqué de le signaler.
En conférence de presse, le sujet de la sécurité a été évoqué, et le politiquement correct a limité la verve des protagonistes. Mais personne n'était leurré : le Paul Ricard doit relever ce niveau de prestation. Quant à la Fédération, elle doit sérieusement se pencher sur la grogne des commissaires de piste. Ces femmes et ces hommes de l'ombre de la compétition, invisibles et indispensables, arrivent à saturation. Le débat doit être ouvert, rapidement.

   Le Bol d'or est revenu à sa place ! Il a encore du travail pour être à la hauteur de ce que l'on attend de lui, mais cette édition 2015 fut une véritable bouffée d'oxygène, de chaleur, de soleil et de joie. Tout est prêt pour revivre un grand moment et tout à été dit (ou suggéré) pour améliorer ce qui doit l'être. La compétition en ressort grandie, l'esprit motard épuré et l'engouement retrouvé. Pour nous, le rendez-vous 2016 a été pris à l'instant où le drapeau à damier a clos ces 24 heures.

Bol d\'or - Pourquoi il fallait y être ; Récit d\'un renaissance.L'équipe de Motoplanete au petit matin, face au soleil levant

M.B. - Crédit photos : Motoplanete

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Avis

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Jp
Faire un billet OK. . Prêcher pour sa paroisse c\'est compréhensible. . Mais dire n\'importe quoi sur un site d\'information. .non ...<br>10 000 spectateurs pour le dernier bol à magny cours. . Faut arrêter les conneries. . Pis le ricard, un circuit sans tribune c\'est tellement bien... pffffff Répondre à Jp

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