Chaque année, des centaines de milliers de casques de moto finissent à la poubelle. Conçus pour protéger les motards, ces équipements essentiels deviennent, après quelques années ou une simple chute, des déchets difficiles à valoriser. Face à cet enjeu environnemental, l'équipementier italien AGV, en collaboration avec plusieurs partenaires, a lancé un projet innovant baptisé "Life Impacto".
Le projet "Life Impacto" : une réponse au défi des déchets
Les casques de moto, composés principalement de plastiques comme l'ABS, l'EPS et le PC, sont aujourd'hui rarement recyclés. Pourtant, la demande de renouvellement est fréquente : usure naturelle, chutes, ou expiration de la durée de vie recommandée (5 à 7 ans)*. Ce constat alarmant a poussé Dainese, la société propriétaire d'AGV Helmets, à concevoir une solution durable en s'entourant de partenaires italiens tels qu'Innovando, Re-sport, Misitano & Stracuzzi, et l'Université de Bologne.
Le projet "Life Impacto", débuté fin 2024, repose sur une technique innovante de recyclage par dissolution sélective, utilisant des solvants biosourcés issus de déchets alimentaires, tels que le limonène et l'acétate d'éthyle. Cette méthode permet de séparer, récupérer et transformer les plastiques des casques usagés en matière première pour la fabrication de nouveaux équipements. En somme, un programme ambitieux, cofinancé par l'Union européenne, ouvrant ainsi la voie à une filière circulaire inédite dans l'univers moto.
Une révolution en la matière ? (les résultats espérés)
5 000 casques recyclés permettront de récupérer :
- 3,7 tonnes d'ABS
- 1 tonne d'EPS
- 600 kg de PC
Les bénéfices environnementaux sont tout aussi significatifs :
- 60 % de réduction des émissions de CO2
- 60 % de baisse de la consommation d'électricité
- 50 % d'économie sur l'usage de l'eau
Ces résultats mettent en lumière une démarche industrielle pionnière, qui pourrait transformer durablement le secteur des équipements moto.
Les défis à surmonter
Si les perspectives sont prometteuses, plusieurs obstacles subsistent. D'abord, la collecte des casques moto en fin de vie, un défi logistique majeur. AGV envisage d'implanter des points de reprise dans les boutiques spécialisées et de collaborer avec des experts en logistique inversée. Ensuite, la fiabilité, le confort et la sécurité des casques recyclés doivent être garanties. Ces équipements devront répondre aux mêmes normes strictes que les modèles traditionnels, sans compromis sur leur robustesse ou leur durée de vie.
Massimo Varese, directeur de la R&D chez Dainese :
Les casques fabriqués auront les mêmes caractéristiques et normes de sécurité que ceux fabriqués avec des plastiques neufs [...] Il s'agit de réutiliser les matériaux autant que possible. Par exemple, le polycarbonate qui fabrique la visière : s'il ne peut pas être utilisé pour son usage initial, il peut être utilisé pour fabriquer de nouveaux spoilers.
Si l'entreprise tend à rassurer sur le volet sécurité, car "sauver des vies continue d'être [notre] objectif", le projet devra enfin prouver sa rentabilité avant une éventuelle généralisation. Une fois le test des 5 000 casques concluant, la Commission européenne pourrait légiférer pour encourager, voire obliger, l'ensemble des fabricants à adopter une démarche similaire.
Que faire de son casque moto usagé ?
Pour l'heure, la question du traitement des vieux casques reste complexe. Certains magasins proposent des initiatives "primes à la casque" (primes à la reprise), or ce système reste limité. Ces casques sont confiés aux pompiers ou à d'autres organisations jusqu'à n'en plus savoir que faire. La majorité des couvre-chefs usagés finit malheureusement en déchetterie, sans garantie d'être recyclés, faute de filières adaptées.
Avec des initiatives comme le projet "Life Impacto", l'avenir est en train de changer. En développant un véritable système de recyclage industriel, ces équipements pourraient être revalorisés au lieu de finir leur vie dans des centres d'enfouissement ou des incinérateurs. Si ce modèle s'impose, il pourrait transformer profondément l'industrie et réduire davantage l'empreinte écologique des motards. En attendant, "Life Impacto" reste un test grandeur nature à suivre de près pour les passionnés de deux-roues et les défenseurs de l'environnement.
*Faut-il vraiment changer son casque deux-roues tous les 5 ans ?
Contrairement à certaines idées reçues, il n'existe aucune obligation légale imposant de renouveler son casque moto ou scooter au bout de cinq ans. Cependant, les fabricants recommandent cette durée en raison de la dégradation progressive des matériaux, qui pourrait compromettre la sécurité du casque en cas de choc.