Fiche moto Al HackelHackel-Wright Chopper 1700 2023 Anti-molaire
Le custom est l’engin parfait pour toutes sortes de personnalisations (d’où son nom), d’excentricités et de délires mécaniques. Sa motorisation culte est le V2 mais bon nombre de Géo Trouvetou lui greffe des propulseurs de tout bord et de tout genre. Parfois même le fruit ahurissant de leur imagination et/ou de leur créativité.
Prenez Al Hackel. Cet américain n’est ni un ingénieur bossant pour un constructeur, ni un préparateur. Tout simplement un passionné doué qui a voulu se construire un chopper avec un moteur improbable : un mono ENORME ; dans des dimensions délirantes. Son bloc atteint les 1700 cm3 ! Presque aussi gros qu’un twin Harley.
Situons un peu la hiérarchie des monos. Actuellement, en production de série, ce type de moteur en grosse cylindrée musclée atteint 692 cm3 chez KTM et 659 cm3 chez Ducati. Suzuki avait atteint 779 cm3 pour son DR 800 S « Big ». Pour voir plus gros, il faut chercher du coté des créateurs, tels Franz Langer ayant modifié un moteur 500 de NSU Konsul pour créé son bloc de 2000 cm3 installé dans sa moto Bison ; ou encore Claus Mees ayant atteint la folie avec son HG 3000 et son piston bougeant dans 3034 cm3.
Ses chiffres spectaculaires ne peuvent supporter la comparaison avec la Hackel-Wright pour une raison simple : la qualité et la finition. Le chopper de Al Hackel est spectaculaire d’épuration et d’essentiel. Le haut niveau d’assemblage et le souci apporté à chaque morceau de la moto témoigne d’un souci davantage artistique que mécanique. L’élégance et le dépouillement vont même parfois trop loin. L’engin a oublié les notions de confiance, laissant la roue avant sans système de freinage. Seul un tambour de bagnole installé dans la roue arrière peut essayer de ralentir l’engin.
Et puis, ce moteur est tellement « propre » et fignolé qu’il semble être le fruit interdit d’un passionné d’aéronautique d’antan. Sa genèse se rapproche d’ailleurs un peu de cette idée. Pour concevoir cet exceptionnel « cogneur », Al est tombé sur une culasse de moteur d’avion en surfant sur eBay. A partir de cet élément issu d’un Wright R-975-46, notre concepteur de l’Illinois a tout construit autour, fabriquant carter, bielle, vilebrequin et tout le nécessaire pour que la créature prenne vie. Pour le piston, il a su adapter celui d’un autre moteur d’avion, un Continental O-470.
Le mélange gazeux nait dans un carbu Weber double corps puis transite dans des conduits exceptionnellement longs. Imaginez ensuite les incroyables coups de piston donnés là-bas dedans, les forces engendrées et les vibrations de taré. L’énergie déployée est inconnue, Hackel n’ayant pas mesuré les watts de son berlingot. A partir de la puissance du moteur d’origine Wright, on peut maladroitement estimer une patate de 60 ch… et une distribution du couple à vous déplacer une vertèbre. La puissance est ensuite transférée à une vieille boite de vitesses Harley de 1947 à 4 rapports via une chaine externe. Une autre chaine terminera le boulot jusqu’à la roue arrière.
La Hackel-Wright Chopper fait aussi une forte sensation avec son cadre tubulaire en acier fort bien construit, aux soudures impeccables. On voit que Al maitrise son sujet. Une très belle fourche à parallélogramme guide le tout tandis que l’arrière rigide n’épargnera les lombaires que par le duo de ressort sous la selle.
Le petit réservoir ne contient que 9,5 litres de carburant, pour avion évidemment, de préférence d’indice d’octane 100. Cette moto surréaliste peut aisément rejoindre le clan des engins guidés par la passion jusqu’à un point d’excellence indéfinissable. Dans un monde où performances, marketing, rentabilité, stratégie et industrie n’existent pas – juste la moto dans une interprétation ultra personnelle.
Raffinement symbolique, le démarrage. Il serait inopportun de lancer cette bielle maousse avec un système électrique. Non, non, à l'ancienne, avec un bon vieux coup de kick.
M.B. - Photos : Instagram Al Hackel