Essai de la KawasakiZ 1100 SE 2026 L'Épopée du couple sous la tempête

Le calendrier était marqué d'une croix rouge : premier contact avec la nouvelle Kawasaki Z 1100 SE, le gros roadster taillé pour les cœurs solides. Si les 200ch de l'hyper roadster ZH2 restent l'apanage des extrémistes, cette Z 1100 promettait l'équilibre parfait entre puissance brute et technologies de pointe.

L'Aventure face à Benjamin

Mon aventure a commencé en plein cœur de la tempête Benjamin, le 23 octobre 2025. Si mes confrères journalistes et moi avons réussi à passer entre les gouttes (ou presque, car l'averse nous a rattrapés en fin de journée), nous avons surtout affronté les éléments : des bourrasques violentes, une route gorgée d'eau où les feuilles fraîches se collaient comme des pièges, et des débris de bois jonchaient le sol.

L'ambiance était électrique, d'autant plus qu'à l'entrée des fameux 17 tournants, dans la vallée de la Chevreuse près de Paris, une grosse branche est tombée à une vingtaine de mètres devant nous. Fort heureusement, personne n'a été blessé. Mes confrères et moi avons uni nos forces pour dégager la route, ajoutant une dimension épique et solidaire à cet essai.

Ces conditions d'essai, loin d'être optimales, m'ont offert la chance unique de découvrir non pas la vitesse maximale, mais le cœur et l'âme sécurisante de la Kawasaki.

Au premier regard, la Z 1100 SE se pose comme l'héritière directe du style Z. Elle conserve l'ADN sculpté de la Z1000 de 2020, avec cet optique avant abaissé qui lui donne un air féroce et combatif. Elle annonce clairement qu'elle est là pour rivaliser avec sa principale cible: la nouvelle Honda CB 1000 Hornet SP.

La finition de qualité japonaise est toujours au rendez-vous. La moto est assemblée avec une rigueur exemplaire : les câblages sont bien ficelés, les carénages sont robustes, aucune fixation ne bouge. Seul un détail de l'intégration de la prise USB jure, l'adhésif utilisé pour fixer son câble ne ressemble à rien d'autre sur la moto. En revanche, l'intégration de la selle, avec l'incrustation du "Z" sous la sangle passager, est particulièrement réussie, petit souvenir de sa précurseuse Z1000R.

Le jeu de couleurs de cette unique version SE est très réussit : le gris et le noir, très sobres, sont électrisés par les jantes vertes qui crient haut et fort l'identité de la marque.

Côté suspensions, la différence est marquée. L'arrière reçoit une belle pièce : un fantastique mono-amortisseur Öhlins S46 haut de gamme. À l'avant, la fourche inversée, bien que technique et identique à la version standard, arbore une couleur jaune dorée. Ce clin d'œil visuel établit le lien avec la noblesse de l'arrière. Ce choix de maintenir la fourche standard à l'avant est une décision stratégique qui permet à la Z 1100 SE de conserver un tarif compétitif et abordable, sans sacrifier l'efficacité de l'ensemble.

Malgré ce choix technique, la face avant n'a pas été négligée en termes de performance pure, notamment grâce à un équipement de freinage de premier ordre. Les étriers Brembo M4.32, associés à des disques de 310mm, sont là pour me rappeler que même quand la bête hurle ses 136ch, la puissance de freinage est là, puissante et rassurante.

Je m'installe. La position, prétendue sportive, m'a étonnamment conquis. Elle est bien basculée sur l'avant, mais elle reste parfaitement supportable. Même après un temps conséquent au guidon, mon dos et mes poignets n'ont exprimé aucune plainte. L'assise est ferme et confortable, et j'apprécie particulièrement la façon dont la place passager rehaussée sert de dosseret naturel lors des franches accélérations.

Le cockpit est un régal : l'écran TFT couleur de 5 pouces est extrêmement lisible et intuitif. C'est un bond en avant par rapport au modèle précédent. D'un seul coup d'œil, je repère les informations cruciales : l'indicateur de vitesse engagée sur la gauche, le mode de conduite sélectionné juste au-dessus, et les options électroniques activées. L'anti-reflet est excellent, et la mire d'horizon m'indique même les degrés d’inclinaison en courbe, un détail grisant. Les commandes au guidon tombent sous la main et, même avec mes gros gants d'hiver, la prise en main est immédiate. Le champ de vision, à la fois dégagé vers l'avant et conservant les rétroviseurs à portée, est un excellent point pour la sécurité.

Malgré la norme Euro 5+, le moteur de la Z 1100 SE ne tarde pas à révéler sa double personnalité. Au démarrage, l'allumage est calme, presque docile, mais dès la première sollicitation de l'embrayage, je sens sa nature s'éveiller. Elle monte dans les tours avec une rage démoniaque, libérant le rugissement puissant et rauque de son quatre-cylindres.

Mais la véritable révélation de cette Z 1100 SE est son couple massif de 113Nm. C'est la force tranquille qui transforme la conduite. Certes, la Z900 est déjà une excellente machine, à laquelle on prête une pseudo concurrence familiale, mais la Z1100 m'offre un confort d'utilisation très agréable en me permettant d'enrouler sans effort dans les bas et mi-régimes. Grâce à cette force disponible, on pourrait presque se passer de la boîte de vitesses.

Cependant, pour un plaisir de pilotage maximal, le shifter Up&Down de série est là pour sublimer l'expérience. Même si le couple rend l'embrayage facultatif, utiliser ce shifter est un régal qui augmente instantanément la sportivité. Avec un empattement réduit (1440 mm), la moto est incroyablement agile, coupant court à la route avec une précision grisante.

C'est dans ces conditions glissantes que la technologie Kawasaki a brillé. Le contrôle de traction, l'IMU, le KIBS : ce sont mes anges gardiens. Le sentiment de sécurité, même en mode Road (je n'ai pas eu besoin de castrer le moteur avec le mode Rain), est rassurant.

J'ai terminé mon périple en mode Sport. La réponse à la poignée est instantanée, la reprise est plus franche, exigeant une concentration accrure, mais offrant un avant-goût jouissif de la bête libérée. Les 5e et 6e rapports allongés promettent des balades plus économiques sur autoroute, un atout non négligeable.

Mon seul regret dans cette bataille contre les éléments ? La fourche avant, un peu ferme, m'a donné un léger manque de feeling en entrée de courbe. Mais il me tarde de la reprendre en main par temps sec pour régler ce détail et explorer tout le potentiel de son châssis.

La Kawasaki Z 1100 SE est une moto très réussie, qui reprend le style de la version 2020 de la Z1000, l'équipement de nouvelle génération de la Z900 (avec son écran TFT), ainsi que le moteur coupleux des Ninja 1100 SX et Versys 1100 SE.

Proposée à un tarif compétitif en France de 13799 €, elle peut être agrémentée d'un pack performance à 1600 € pour les plus exigeants, lequel inclut notamment un silencieux Akrapovic en carbone, un capot de selle et un saute-vent. Elle n'a plus grand chose à envier à ses concurrentes. Elle est un vrai concentré de couple et de qualité qui annonce clairement la couleur.

Mon essai, réalisé dans des conditions non propices à la découverte de toutes les facettes de la moto, n'était qu'un avant-goût. J'ai grande hâte de reprendre son guidon pour évaluer son potentiel maximal et approfondir ma découverte de cette belle machine. La Z 1100 SE est disponible en concession dès la semaine prochaine : courez vite l'essayer et, surtout, revenez nous donner votre avis et votre propre ressenti sur le site pour enrichir la discussion.

Photographe: Jean Francois Muguet