Symbole d'audace et de performance, KTM traverse l'une des crises les plus marquantes de son histoire. Confronté à une chute drastique de ses ventes et à des difficultés financières majeures, le constructeur autrichien amorce une restructuration d'envergure. Départ de Stefan Pierer, suppression de milliers de postes, recherche d'investisseurs et incertitudes sur l'avenir en MotoGP... KTM joue une partie cruciale pour assurer sa survie et préserver son statut sur la scène internationale.
Pierer Mobility : Stefan Pierer passe le flambeau
Après plus de trois décennies à la tête de KTM, Stefan Pierer se met en retrait de la présidence du groupe Pierer Mobility AG. Une décision marquante pour celui qui a façonné l'identité du constructeur autrichien depuis 1992. Il cède ainsi sa place à Gottfried Neumeister, déjà membre du conseil d'administration depuis le début de l'année, mais reste impliqué dans le processus de réorganisation.
Stefan Pierer, désormais ex-directeur KTM :
KTM a toujours été bien plus qu'une simple entreprise : c'était et c'est encore une passion, une mission et une famille. La décision de passer le flambeau n'a pas été facile. Je suis convaincu que Gottfried Neumeister, avec sa vision stratégique et son engagement, est le choix idéal pour diriger KTM vers l'avenir.
Une restructuration vitale pour le constructeur autrichien
Le départ de Pierer intervient dans un contexte économique difficile. En 2024, KTM a écoulé 292 497 motos, enregistrant une chute de 21 % de ses ventes par rapport à l'année précédente. L'Europe représente 38 % de celles-ci, suivie par l'Amérique du Nord (24 %), l'Inde et l'Indonésie (21 %) et les autres marchés (17 %). Si le niveau des ventes aux particuliers est resté stable (268 000 unités), la baisse des commandes auprès des concessionnaires témoigne d'un ralentissement inquiétant.
Face à cette crise, KTM a mis en place plusieurs mesures drastiques, dont la suppression de 1 800 postes, faisant de Jeremy McWilliams une victime collatérale, et la réduction de sa production à 230 000 motos, soit 26 % de moins qu'en 2023. Ces choix ont permis d'abaisser les stocks de 40 000 unités (-18 %) mais ont aussi précipité une chute du chiffre d'affaires, passé de 2,7 milliards d'euros en 2023 à 1,9 milliard en 2024 (-29 %). Le groupe prévoit un EBITDA (Bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) négatif d'environ 300 millions d'euros, avec des pertes qui se chiffreront en plusieurs centaines de millions.
Pour surmonter cette crise, Pierer Mobility s'apprête à accueillir de nouveaux investisseurs. L'Indien Bajaj et le Chinois CFMoto, déjà partenaires du groupe, sont pressentis pour apporter les fonds nécessaires à la restructuration et au respect des exigences de la justice autrichienne, qui impose un financement d'au moins 30 % du montant des dettes.
Officiel : MV Agusta retrouve son indépendance
Dans ce contexte de réorganisation, KTM a dû se séparer d'un actif précieux : MV Agusta. Le constructeur italien, acquis par Pierer Mobility AG en 2024, repasse sous le contrôle de la famille Sardarov, moins d'un an après. Timur Sardarov reprend ainsi les rênes de l'entreprise et affiche des ambitions élevées. "Reprendre le contrôle total de l'entreprise signifie que nous sommes désormais plus forts et plus concentrés que jamais sur l'excellence", affirme-t-il. Les chiffres lui donnent raison : avec 4 000 motos vendues en 2024, MV Agusta affiche une progression de 116 % par rapport à 2023
Quel avenir pour KTM en MotoGP ?
Des rumeurs laissaient entendre un possible départ à l'issue du contrat avec Dorna en 2026, malgré cette situation financière délicate, KTM affirme vouloir maintenir son engagement en MotoGP.
Pit Beirer, directeur de KTM Motorsport, se veut rassurant :
Nous avons un plan, nous allons économiser sur certains postes, mais nous n'arrêterons pas le développement des motos. En MotoGP, on ne peut pas simplement participer pour être là. Si vous vous absentez un an, vous risquez de passer de la lutte pour le podium à la dernière place.
La prochaine échéance cruciale pour KTM est fixée au 25 février, date à laquelle les créanciers devront approuver le plan de restructuration. En attendant, la marque autrichienne continue de travailler sur la RC16, qui sera confiée à Brad Binder, Pedro Acosta, Enea Bastianini et Maverick Viñales. Pour 2027, KTM s'attarde déjà sur sa future moto en s'adaptant aux nouvelles réglementations, bien que celles-ci ne soient pas encore totalement finalisées.
BMW veille au grain
Alors que KTM lutte pour sécuriser son avenir en MotoGP, BMW affiche son intérêt croissant pour la catégorie reine. Sven Blusch, directeur de BMW Motorrad Racing, a confirmé que la marque allemande travaille sur un projet sérieux et réfléchit à une entrée en Grand Prix
En parallèle, KTM doit aussi revoir son engagement en Moto2 et Moto3. "Le plan est de rester, mais avec une réduction du programme. Nous avons le budget pour 2025, mais aucune décision n'a encore été prise pour 2026 et 2027", indique Beirer.
Qu'importe ce que demain lui réserve, KTM se veut un prétendant au titre en MotoGP cette année, comme affirmé lors de la présentation en ligne du 30 janvier dernier. La marque orange traverse la période la plus délicate de son histoire. Toutefois, KTM espère toujours se relancer et conserver sa place parmi les acteurs majeurs du marché moto.
Crédits photo principale : KTM / MotoGP
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