Essai de la RiejuAventura 500 2024 Rallier doucement n’importe quel coin de France

Résumé de l'essai de la Aventura 500
- Moteur (2/5)
- Châssis (3/5)
- Freinage (3/5)
- Equipement (5/5)
Les points forts
- Autonomie de fou
- Grosse dose d'équipements
- Confort
Les points faibles
- Moteur peu pêchu
- Vibrations
- Béquille latérale mal fichue
L'avis de notre essayeur sur la Aventura 500 de 2024

Brohhbeuubeuuhh. Une série de hoquets, une voix qui s’étouffe, quelques centaines de mètres sur l’élan. Plus rien. C’est la panne sèche !
Et c’est voulu ! Rijeu a lancé son Aventura 500 avec quelques arguments chocs et un petit détail dont la motosphère s’est rapidement emparé : ses 1000 bornes d’autonomie. Motoplanete a donc choisi un soir de décembre pour découvrir la bécane espagnole et l’emmener faire une petite promenade. L’objectif : partir de chez SLD Motos à Aoste, aller cuisiner des diots chez un pote en faisant 1000 km en 1 jour par 1° de température.
On ne va pas faire comme 90% des médias internet (toutes catégories confondues) qui vous font poireauter avec un titre racoleur et 1 500 mots rasoirs avant de vous délivrer l’info. Quand les deux réservoirs furent intégralement torpillés, l’Aventura 500 avait parcouru 938 kilomètres. Mission échouée ? Pas tout à fait. Il faisait froid tout le long, on a mangé les diots, et la consommation fut mise à mal par un mistral de dingue ayant entrainé une surconsommation sensible. Un litre aux cent d’après le système de bord (le trip de conso ne s’affiche qu’avec le mode Miroir) sur plus de 300 bornes. Sans ce caprice glacial de la nature, la Rieju aurait tenu environ 1050 km.
Un score à la portée de l’éco-marathon Shell. En tout cas, nous avons établi le record mondial au niveau du quartier ;-). Blague à part, cette virée en Rieju ne s’est pas limitée à ce kilométrage provocant. C’est un argument apte à faire le buzz, focaliser les projecteurs, se distinguer de la concurrence mais fondamentalement loin d’être son axe prioritaire. La 500 Aventura est une moto pour explorer le monde à petite échelle, avec un équipement très riche, aussi bien dans la catégorie que pour le prix. Quand on découvre ses crash-bars haut ET bas, son sabot moteur en alu, ses balles jantes dorées à rayons, le porte-paquet, les protège-mains (avec renfort en alu) et la béquille centrale, la première impression est que nous sommes en face d’un modèle blindé d’options. Eh bien pas du tout ; tout est de série. Avec du matos qui est loin de sortir de chez Wish. La qualité semble bel et bien là, avec une finition très correcte et des matériaux apparemment de qualité. La structure du cadre, les supports de repose-pieds (surtout passager), le bras oscillant en alu, l’épure de suspension arrière avec ses stries d’usinage parfaitement alignées, le traitement général accordé aux différents éléments - tout semble de bonne facture, à tel point que l’ensemble démolit l’image rétro et rétrograde de camelote chinoise.
Le bel écran TFT de 7 pouces accueille le pilote avec une sympathique petite animation puis bascule vers un affichage des plus réussis. Simple, bien agencé, agréable ; mais finalement assez peu fourni en dehors des infos principales. Un petit capteur le fait switcher du mode jour au mode nuit sans intervention de l’utilisateur.
Un bémol nous interpelle. A quoi peut bien se servir la sous-partie de cet écran. Bien que le rapprochement soit immédiat avec le bloc d’instrumentation minimaliste secondaire de l’Africa Twin, on ne peut se prononcer car rien ne s’allume, rien ne s’affiche. Rien ne s’y conçoit ?
Par sur cette Rieju en tout cas. En chine, son clone originel HJ500-8 a bel et bien toute une série d’informations dans ce bloc additionnel : vitesse, jauge à carburant, tension de la batterie, etc... Son affichage principal est aussi plus riche : température extérieure, altitude, pression des pneus, système caméra. Hengjian doit surement proposer plusieurs niveaux de finition pour ses motos “à l’export”, et Rieju a choisi une version moins chargée en gadgets.
La catégorie 500 se pose comme l’entrée de gamme des gros cubes, et il ne faut pas s’attendre à des périphériques de grande qualité. La Rieju ne voit pas les choses ainsi. Vu son prix agressif, elle n’a pu se doter de suspensions Öhlins ou du matos haut de gamme mais rien que la vue de la belle fourche inversée anodisée or entreprend un sentiment de qualité. Ce n’est pas du flan et cela se ressent au guidon. Les suspates travaillent de façon homogène et assurent le confort quasiment en toute circonstance. Le “toucher” de la route est correct mais la remontée d’informations trop peu communicative. On imputera cela aux pneus plutôt qu’au train avant. La retenue en hydraulique est bien calibrée et revoir le comportement de l’amortissement est on ne peut plus simple avec des réglages à molettes sur le haut des tubes de fourche. L’amortisseur arrière demande quant à lui des outils. Mais sur certaines compressions un peu fortes, les suspensions ont tendance à taper et montrent leurs limites.
A l’usage, cette Rieju est vraiment épatante pour une moto de ce segment, avec une partie-cycle saine et agile, à la prise en main immédiate et au comportement naturel. Que ce soit les réservoirs remplis à bloc ou la gorge sèche, elle se laisse emmener avec neutralité. Cependant, nous avons parfois senti un très léger “point de retenue” quand on la balance d’un angle à l’autre. Peut-être bien dû à l’amortisseur de direction. Le rayon de braquage est surprenant, apte à faire demi-tour dans un couloir. Le freinage est lui aussi convaincant, pas trop puissant mais suffisant et finalement très accordé au comportement de la machine. Une position de conduite agréable, aussi bien debout qu’assis, complète un beau tableau. On a pourtant craint pour le postérieur dès les premiers mètres. La selle est ferme, apparemment sans concessions. A contrario, le constat fut déroutant à la fin de l’essai, avec un fessier sans douleur ni gène et prêt à repartir pour autant de bornes. Pas le dos, mais le mien est démoli depuis longtemps.
Sauf à la bousculer dans un usage pour laquelle elle n’est pas prévue, la Rieju Aventura 500 se débrouille très bien avec son châssis. C’est coté moteur que la discordance est flagrante. Ce n’est pas un mauvais moteur ; c’est plutôt que son utilisation correspond « plus ou moins » – une explication est nécessaire.
Rieju, à vrai dire Hengjian, a pris sa mécanique chez Loncin, avec le très répandu bicylindre LX68MR. Ce bloc cube 471 cm3, avec une puissance nominale de 47,5 chevaux. C’est parfait pour rentrer dans les clous du permis A2. Les jeunes permis seront d’ailleurs contents de ce moulin. Assez souple mais demandant quand même un peu d’assistance au levier à basse vitesse (ça forge l’expérience et rappelle le plateau), il pousse gentiment son monde, de façon rassurante et progressive. Ni timides ni impressionnantes, les bielles s’agitent dans un bruit assez rugueux et pas forcément mélodieux. Sa sonorité m’a rappelé sous certains aspects celle de la Z 650, pas forcément flatteuse.
Mais si le moulbif satisfera les attentes des pas-énervés et motards bucoliques, il se révèle en revanche trop limité pour une utilisation enjouée ou véritablement routière. Déjà, il vibre ; pas des pulsations profondes comme on les aime sur un bi mais trépidantes et sèches. Acceptables dans les bas et mi-régimes puis agaçantes au-delà. Cependant, on finit par s’y faire à vitesse stabilisée. Mais ce n’est pas ça le plus gênant. A 130 km/h, le compte-tours affiche 6300 tr/mn. C’est haut, surtout que la zone rouge commence 1 700 trs plus tard. Etonnamment, celle-ci commence avant le régime du pic de puissance, à 8 500 trs. De toute façon, s’y aventurer n’est guère incité. Le moteur semble nous téléphoner que cette vitesse n’est pas la meilleure pour lui. D’ailleurs, c’est vers 110-120 km/h que l’allure parait la plus adéquate.
190 kilos à sec, ce n’est pas trop lourd pour un trail moderne. Même avec les 40 litres de benzine, la sino-espagnole ne fait pas vraiment sentir son poids. Mais le twin ne le ressent pas ainsi. Plus que la puissance, c’est le manque de couple qui se fait sentir à la relance. Avec 4,4 mkg sous la main, la Rieju ne peut pas faire de miracle. Une bonne montée alourdit les ailes de la moto, tandis que les dépassements exigeront de tomber deux ou trois rapports. Ce n’est pas une tare mais ce moteur donne l’impression d’avoir un gros 2 et demi plutôt qu’un 500. Le bloc Honda, pourtant doté des mêmes watts, est bien plus convaincant.
La boite de vitesses est exempte de tout reproche. La sélection verrouille parfaitement, dans un maniement de sélecteur à la fois doux et précis. Le genre de mécanisme qui se fait oublier au bout de 100 mètres, pour ensuite être utiliser sans même y réfléchir.
Roulons un peu, histoire de se réchauffer dans cette nuit d’eau et d’horizons. Les deux réservoirs ont été remplis à bloc, la combarde étanche va de nouveau être la meilleure amie du monde, allons voir le sud. Tel un petitou oiseau migrateur, l’Aventura franchit les villes et villages sans retenue. Un petit évènement intervient après Valence. La première barre de la jauge à essence vient de s’effacer - au bout de 281 kms. Il en reste encore 9 sur le compteur. Diantre, cette moto pourrait-elle aligner 2 800 kms d’une traite !?!. Lol.
Non, la jauge est d’une progressivité relative. Si le premier segment tient le coup longtemps, les 3 suivants dégagent bien plus rapidement. Vient ensuite la réserve, capable d’engloutir une centaine de kms. Une fois à sec, ou quand on veut, passer d’un réservoir à l’autre demande un peu de manip : faire tourner une molette de sélection du côté des durites pour choisir l’arrivée du breuvage pétrolier puis appuyer sur un bouton à droite du tableau de bord pour enclencher la pompe à carburant du réservoir 2. Assez étrange au début car on ne sait jamais trop sur quel réservoir on biberonne. Les concepteurs ont certainement souhaité faire des économies (de bout de chandelles) alors que capteur sur le robinet d’essence aurait pu automatiser cela.
Attention à un point délicat, l’Aventura est haute. Elle peut entrainer quelques déséquilibres au stops, feux rouges et arrêts divers. Je ne suis pas très grand non plus mais mieux vaut préparer son déhanché lors des arrêts. Et bien enregistrer où se trouve l’ergot de béquille latérale. Il ne vient pas instinctivement sous le talon. Placé plus en arrière et en hauteur, l’appendice demande le regard et un peu de précision. Pire, lorsqu’on est chaussé de crampons bien dessinés, c’est un calvaire d’engager cette béquille qui a tendance à se coincer dans la semelle, et qui rend encore plus aléatoire le feeling de celle-ci à chaque béquillage. La frangine centrale est aussi un peu revêche : le repose-pied passager est pile-poil au-dessus de la tige d’appui et gène la botte pour effectuer l’opération.
Côté connectivité, l’Aventura 500 propose une relation avec smartphone via l’application Carbit Ride. Si cette liaison se fait plutôt rapidement, nous n’avons pas vraiment pu exploiter complètement celle-ci par manque de temps et en raison d’une interface uniquement en anglais et espagnol qui nous a mis en échec à la première difficulté. Il y a une application de navigation intégrée à l’interface mais nous n’avons pas réussi à la faire fonctionner. Pour ce périple, nous avons par contre facilement pu utiliser la fonction Mirror Link et l’appli Waze.
La Rieju Aventura 500 est un paradoxe. Voilà une moto plutôt plaisante à regarder, avec sa gueule d’Africa Twin, agréable à piloter, confortable, doté d’une bulle offrant une bonne protection, prête à faire beaucoup (BEAUCOUP) de bornes mais pourvu d’un moteur qui ne lui offre pas les moyens de ses ambitions. OK, on l’a fait, parti le soir et retour le lendemain (quasi) 1000 km plus tard sans faire le plein. Mais les rouleurs ne se satisferont pas de ce moulin, pas assez coupleux ni rempli. Dommage, car la Rieju est enthousiasmante sur bien des points. A titre perso, laissez-moi pensez que la même moto, avec un bloc de 800 V-strom, des poignées chauffantes de série, 8000 balles à acquitter et de bons pneus ferait un carton plein.
M.B. - Texte et photos / avec la participation de Sebastien de Malfin
et de la concession Rieju SLD Motos
Lesplus
- Autonomie de fou
- Grosse dose d'équipements
- Confort
Lesmoins
- Moteur peu pêchu
- Vibrations
- Béquille latérale mal fichue
Les notes de l'essayeur








