Fiche moto HondaRC 30 - VFR 750 R 1988 La légende des circuits
Nous sommes en 1987. Cyril Neveu vient de remporter pour la cinquième fois le Paris-Dakar ; L’Airbus A320 vient de décoller ; Ferrari dévoile la F 40 ; Une petite chaine de télé voit le jour : M6 ; On commence à construire le tunnel sous la Manche ; Mais l’important n’est pas là… Le monde va bientôt être à nouveau bouleversé. Alors que les récentes Suzuki 750 et 1100 GSX-R viennent d’accélérer sensiblement la vitesse de rotation de la Terre, une nouvelle machine va éclore des paddocks. Une fille de la piste, dont les initiales deviendront bientôt l’abréviation d’un fantasme. 4 signes, qui seront symboliques et absolus : RC 30.
Ca claque comme le nom de code d’un chasseur de l’US Air force (NDLR : la Honda CBR 1100 XX adoptera 10 ans plus tard l’appellation Super Blackbird, en référence à l’avion américain SR-71). Une sportive pas comme les autres, une 750 qui joue dans une autre cour que les GSX-R, FZ et ZXR. Non, pas une sportive – une machine de course, conçue pour la piste et homologué pour la route. Une création sans concession du HRC, belle, sublime, doté d’un patrimoine génétique éloquent. Elle est directement issue de la RVF usine d’endurance, elle-même puisant son inspiration dans la 500 de vitesse. Exceptionnelle ? Aucune ambigüité là-dessus. Impossible d’en douter quand on sait que cette moto est assemblée à la main directement au HRC. Son but n’est d’ailleurs pas caché : le Superbike. Un championnat prometteur que la FIM va lancer l’année prochaine (Aujourd’hui, plus de 20 ans après, le SBK est devenu l’un des plus retentissants championnats du monde moto).
Il y a d’abord cette silhouette. Ramassée, basse, tendue, sans compromis, comme une 500 de GP. Une 7 et demi taillée dans la performance, où chaque détail prouve l’implication de la RC 30 dans la compétition. Enlevons ce carénage et découvrons ce qui se cache sous cet assemblage en FRB (Fiber Reinforced Plastic), un matériau plus léger mais aussi plus résistant que le plastique. Il n’aura fallu que quelques instants, car l’habillage (fabriqué à la main) est maintenu par de grosses agrafes fixées derrière les éléments. Une fois nue, l’admiration et le trouble nous envahissent. La course est là, à fleur de peau.
Approchez. Plus près, encore. De loin, le superbe châssis disparait sous le bordel des durites, câbles et autres périphériques. Il faut être assez près, jusqu’à sentir l’odeur de l’alu, pour détailler et se délecter du cœur de la RC 30, son V4. Un moteur peu répandu chez les sportives 4 temps, dont je vous rappelle rapidement le leitmotiv : la puissance et les régimes d’un 4 cylindres sans son imposante largeur. De quoi affiner une moto, améliorer son aérodynamique, sans sacrifier au power. Et ce bouilleur, il justifie à lui seul l’exceptionnel de cette machine. Quelques chiffres : 748 cm3, un angle d’ouverture entre les bancs de cylindre de 90°, un calage à 360° pour une explosion par tour de vilo, une zone rouge à 12 500 tr/mn, et 91 chevaux à la sortie. QUOI !!! C’est une blague ?!?
Effectivement, il y a de quoi hérisser le poil. Mais il s’agit du bridage pour la France. Et ne nous plaignons pas trop : la version japonaise est calmée à 77 ch. Respirons un peu en sachant que la version normale développe 112 bourrins, et que la greffe d’un kit HRC lui permet de grimper jusqu’à 122 ch. Et si le cœur (ainsi que le portefeuille) vous en dit, le kit TTF1 annonce une puissance de 133 ch. Heureusement, les bielles en titane sont prévues pour tenir le coup.
Avant d’installer ces kits, observons le souci de compacité et d’efficacité dont les motoristes de HRC ont fait preuve. A commencer par les soupapes équipées de poussoirs guidées dans la culasse permettant l’attaque directe par les cames des ACT ; d’où moins de frictions, un allégement de la culasse, et des pipes d’admission relevées de 6° ainsi que des conduits plus rectilignes. L’entrainement de la distribution par cascade de pignons offre une précision rarement vue, sans compter ce sifflement très particulier et le souci en moins du remplacement de deux chaines. Les carbus sont des 35 mm spécialement étudiés pour cette VFR-R. Et pour le refroidissement, 2 remarquables radiateurs incurvés évacuent les calories.
Une petite attention du HRC qui mérite toute notre attention, c’est le mécanisme anti-dribble installé dans l’embrayage. En cas de rétrogradage mal calculé à haute vitesse, le couple résiduel non digéré par le moteur va provoquer du dribble ou un blocage de la roue arrière. Honda a installé un limiteur de couple qui agit sur les disques d’embrayage. En cas de surcharge, le système agit sur 3 disques, réduisant le couple d’environ 35%.
Machine de route oblige, la RC 30 accuse 18 kg de plus sur la balance que la RVF officielle – Mais le V4, lui, pèse exactement le même poids dans l’une ou l’autre machine : 75 kg.
Autour de ce petit temple technologique, Honda a pris soin de mettre un châssis à la hauteur. Le cadre, par exemple, n’est pas vraiment un double poutre périmétrique en alu comme les autres – il est issu des mêmes moules que ceux de la RVF ; mais légèrement renforcé pour résister aux contraintes de la route. Ancré à ses anches, on touche le sublime : un magnifique monobras pro-arm, fruit des amours entre Honda et ELF. Une telle pièce sur une sportive de route, c’est du rêve. D’un coté s’y ajoute une superbe jante multibranches, de l’autre on peut découvrir que tous les écrous de la couronne sont freinés au fil de fer, comme en compet’. D’ailleurs, les déclinaisons entre la RVF et la RC 30 sont nombreuses : dessin identique pour les très larges roues en aluminium moulé (magnésium sur la RVF), fourche à démontage rapide de 43 mm à double réglage (détente et compression), té supérieur en alu poli, monomaortisseur à bonbonne séparée réglable en compression et détente, double disques avant de 310 mm pincés par des étriers à 4 pistons (conçus pour faciliter un changement rapide de plaquettes), et une multitude de détails à la fois efficace, léger et pouvant être changé en un rien de temps.
Du matos de folie ? Non, simplement le meilleur pour la meilleure des sportives. Un engin dont bien peu aurait osé rêver qu’elle soit un jour sur la route. Mais ça y est ! Honda l’a fait, et propose certainement la moto la plus emblématique des années 80.
Considéré comme l’un des modèles les plus prestigieux de Honda, la RC 30 a été fabriquée à plus de 4700 exemplaires, chacun démarré par une clé incrustée de carbone. Les victoires que l’on peut inscrire à son palmarès donnent le vertige : plusieurs fois le Bol d’or, les 24 heures du Mans et les 8 hrs de Suzuka, des victoires et des titres dans tous les championnats Superbike mondiaux, une foule de succès au Tourist Trophy. Mais ce rêve à un prix : presque 90 000 francs. Ah oui, ça, c’est la baffe que personne ne voudrait savoir. Mais est-ce vraiment si déraisonnable pour avoir la moto de Sarron dans le garage ?
* 90 000 francs, qu’est ce que ça représentait à l’époque ? Environ 19 mois de SMIC, presque une Renault 5 GT Turbo, 2 GSX-R 750, plus de 30 000 baguettes de pain, ou encore 18 600 litres de SP 95.
M.B - Photos constructeur
Cette petite vidéo promotionnelle de l'époque montre clairement le travail de pasion et d'orfévrerie que Honda témoignait pour sa RC 30.
Nous sommes en 1987. Cyril Neveu vient de remporter pour la cinquième fois le Paris-Dakar ; L’Airbus A320 vient de décoller ; Ferrari dévoile la F 40 ; Une petite chaine de télé voit le jour : M6 ; On commence à construire le tunnel sous la Manche ; Mais l’important n’est pas là… Le monde va bientôt être à nouveau bouleversé. Alors que les récentes Suzuki 750 et 1100 GSX-R viennent d’accélérer sensiblement la vitesse de rotation de la Terre, une nouvelle machine va éclore des paddocks. Une fille de la piste, dont les initiales deviendront bientôt l’abréviation d’un fantasme. 4 signes, qui seront symboliques et absolus : RC 30.
Ca claque comme le nom de code d’un chasseur de l’US Air force (NDLR : la Honda CBR 1100 XX adoptera 10 ans plus tard l’appellation Super Blackbird, en référence à l’avion américain SR-71). Une sportive pas comme les autres, une 750 qui joue dans une autre cour que les GSX-R, FZ et ZXR. Non, pas une sportive – une machine de course, conçue pour la piste et homologué pour la route. Une création sans concession du HRC, belle, sublime, doté d’un patrimoine génétique éloquent. Elle est directement issue de la RVF usine d’endurance, elle-même puisant son inspiration dans la 500 de vitesse. Exceptionnelle ? Aucune ambigüité là-dessus. Impossible d’en douter quand on sait que cette moto est assemblée à la main directement au HRC. Son but n’est d’ailleurs pas caché : le Superbike. Un championnat prometteur que la FIM va lancer l’année prochaine (Aujourd’hui, plus de 20 ans après, le SBK est devenu l’un des plus retentissants championnats du monde moto).
Il y a d’abord cette silhouette. Ramassée, basse, tendue, sans compromis, comme une 500 de GP. Une 7 et demi taillée dans la performance, où chaque détail prouve l’implication de la RC 30 dans la compétition. Enlevons ce carénage et découvrons ce qui se cache sous cet assemblage en FRB (Fiber Reinforced Plastic), un matériau plus léger mais aussi plus résistant que le plastique. Il n’aura fallu que quelques instants, car l’habillage (fabriqué à la main) est maintenu par de grosses agrafes fixées derrière les éléments. Une fois nue, l’admiration et le trouble nous envahissent. La course est là, à fleur de peau.
Approchez. Plus près, encore. De loin, le superbe châssis disparait sous le bordel des durites, câbles et autres périphériques. Il faut être assez près, jusqu’à sentir l’odeur de l’alu, pour détailler et se délecter du cœur de la RC 30, son V4. Un moteur peu répandu chez les sportives 4 temps, dont je vous rappelle rapidement le leitmotiv : la puissance et les régimes d’un 4 cylindres sans son imposante largeur. De quoi affiner une moto, améliorer son aérodynamique, sans sacrifier au power. Et ce bouilleur, il justifie à lui seul l’exceptionnel de cette machine. Quelques chiffres : 748 cm3, un angle d’ouverture entre les bancs de cylindre de 90°, un calage à 360° pour une explosion par tour de vilo, une zone rouge à 12 500 tr/mn, et 91 chevaux à la sortie. QUOI !!! C’est une blague ?!?
Effectivement, il y a de quoi hérisser le poil. Mais il s’agit du bridage pour la France. Et ne nous plaignons pas trop : la version japonaise est calmée à 77 ch. Respirons un peu en sachant que la version normale développe 112 bourrins, et que la greffe d’un kit HRC lui permet de grimper jusqu’à 122 ch. Et si le cœur (ainsi que le portefeuille) vous en dit, le kit TTF1 annonce une puissance de 133 ch. Heureusement, les bielles en titane sont prévues pour tenir le coup.
Avant d’installer ces kits, observons le souci de compacité et d’efficacité dont les motoristes de HRC ont fait preuve. A commencer par les soupapes équipées de poussoirs guidées dans la culasse permettant l’attaque directe par les cames des ACT ; d’où moins de frictions, un allégement de la culasse, et des pipes d’admission relevées de 6° ainsi que des conduits plus rectilignes. L’entrainement de la distribution par cascade de pignons offre une précision rarement vue, sans compter ce sifflement très particulier et le souci en moins du remplacement de deux chaines. Les carbus sont des 35 mm spécialement étudiés pour cette VFR-R. Et pour le refroidissement, 2 remarquables radiateurs incurvés évacuent les calories.
Une petite attention du HRC qui mérite toute notre attention, c’est le mécanisme anti-dribble installé dans l’embrayage. En cas de rétrogradage mal calculé à haute vitesse, le couple résiduel non digéré par le moteur va provoquer du dribble ou un blocage de la roue arrière. Honda a installé un limiteur de couple qui agit sur les disques d’embrayage. En cas de surcharge, le système agit sur 3 disques, réduisant le couple d’environ 35%.
Machine de route oblige, la RC 30 accuse 18 kg de plus sur la balance que la RVF officielle – Mais le V4, lui, pèse exactement le même poids dans l’une ou l’autre machine : 75 kg.
Autour de ce petit temple technologique, Honda a pris soin de mettre un châssis à la hauteur. Le cadre, par exemple, n’est pas vraiment un double poutre périmétrique en alu comme les autres – il est issu des mêmes moules que ceux de la RVF ; mais légèrement renforcé pour résister aux contraintes de la route. Ancré à ses anches, on touche le sublime : un magnifique monobras pro-arm, fruit des amours entre Honda et ELF. Une telle pièce sur une sportive de route, c’est du rêve. D’un coté s’y ajoute une superbe jante multibranches, de l’autre on peut découvrir que tous les écrous de la couronne sont freinés au fil de fer, comme en compet’. D’ailleurs, les déclinaisons entre la RVF et la RC 30 sont nombreuses : dessin identique pour les très larges roues en aluminium moulé (magnésium sur la RVF), fourche à démontage rapide de 43 mm à double réglage (détente et compression), té supérieur en alu poli, monomaortisseur à bonbonne séparée réglable en compression et détente, double disques avant de 310 mm pincés par des étriers à 4 pistons (conçus pour faciliter un changement rapide de plaquettes), et une multitude de détails à la fois efficace, léger et pouvant être changé en un rien de temps.
Du matos de folie ? Non, simplement le meilleur pour la meilleure des sportives. Un engin dont bien peu aurait osé rêver qu’elle soit un jour sur la route. Mais ça y est ! Honda l’a fait, et propose certainement la moto la plus emblématique des années 80.
Considéré comme l’un des modèles les plus prestigieux de Honda, la RC 30 a été fabriquée à plus de 4700 exemplaires, chacun démarré par une clé incrustée de carbone. Les victoires que l’on peut inscrire à son palmarès donnent le vertige : plusieurs fois le Bol d’or, les 24 heures du Mans et les 8 hrs de Suzuka, des victoires et des titres dans tous les championnats Superbike mondiaux, une foule de succès au Tourist Trophy. Mais ce rêve à un prix : presque 90 000 francs. Ah oui, ça, c’est la baffe que personne ne voudrait savoir. Mais est-ce vraiment si déraisonnable pour avoir la moto de Sarron dans le garage ?
* 90 000 francs, qu’est ce que ça représentait à l’époque ? Environ 19 mois de SMIC, presque une Renault 5 GT Turbo, 2 GSX-R 750, plus de 30 000 baguettes de pain, ou encore 18 600 litres de SP 95.
M.B - Photos constructeur
Cette petite vidéo promotionnelle de l'époque montre clairement le travail de pasion et d'orfévrerie que Honda témoignait pour sa RC 30.
1988
1989
1990
1991
Note : 5/5 Répondre à Chicboy