Fiche moto HondaCBR 600 RR 2024 Loin d'avoir dit son dernier mot...
Vous y êtes, peu importe la vitesse, la rotule à quelques centimètres du sol et le baculum en action. La trajectoire est tendue, fidèle et indissociable à l’existence même de la Honda CBR 600 RR. Née en 1987, disparue des radars en 2017, la mère des Supersports s’est décidé à mettre fin à sa traversée du désert pour la plus grande satisfaction des amateurs de pistardes.
C’est un retour en décalage : l’une des plus célèbres sportives de Honda nous revient en 2024 mais dans les faits, c’est en 2021 que la nouvelle génération est arrivée ; uniquement pour une partie du marché asiatique. La CBR 600 ici présente est donc inédite pour nous mais pas pour l’autre côté de la terre.
Nos fidèles lecteurs japonais découvriront un nouveau millésime, avec satisfaction mais sans surprises. Contrairement à nous, enchanté de retrouver cette icône de la catégorie. Ses lignes ont sensiblement évolué sans véritablement changer sa nature. Le plus marquant étant son regard plus affuté, aux multiples pupilles de LEDs incrustées dans un froncement sadique. Les panneaux de carénage et le sabot sont légèrement redessinés puis fait est de constater que la partie arrière demeure sans évolution. La 600 CBR montre ainsi une disposition d’échappement très particulière : sous la selle. Ce qui fut une mode incontournable est aujourd’hui tout simplement inenvisageable, vu la recherche obsessionnelle d’optimisation des masses. La CBR s’en fout ; cela lui rappelle la RCV 211 de MotoGP.
La mode à présent, ce sont les winglets. Elle s’en approprie, sans en faire trop. Deux petits ailerons sont apparus sur les flancs, tels les canards du Rafale. De quoi officiellement amélioré la stabilité et la vitesse de passage en courbe.
Nous y voilà : la vitesse. C’est à sa poursuite que les sportives n’ont cesse de s’affairer. Pour y parvenir, la CBR renouvelle sa confiance dans son bon vieux 4-cylindres de 599 cm3. Ces dernières années, Honda lui a augmenté le diamètre de ses corps d’injection, redessiné les conduits d’admission, recalé la distribution, et ajouté (enfin) deux assistances fort utiles et appréciées : un shifter et un embrayage assisté anti-dribble.
Par contre, pour revenir sur le marché européen, il a fallu le validé Euro5, grâce notamment à un catalyseur plus grand. Et le propulseur ne s’en sort pas si mal. Il gagne même un cheval de puissance, pour un total de 121 bourrins à 14 250 tr/mn. Le couple n’a pas eu cette chance et perd quelques Nm. Les deux compères doivent aussi aller chercher leur plus fort potentiel plus haut dans les tours. La Honda se permet d'être un peu plus puissante que sa meilleure ennemie, la R6 ; alors que ce fut l'inverse pendant tant d'années.
Quand la CBR 600 RR nous a dit au revoir en 2017, les seules assistances au pilotage qu’elle connaissait se limitaient à un ABS couplé (très lourd) et un amortisseur de direction électronique. C’était à la fin d’une époque où seule la main droite gérait l’hystérie du moteur.
Tout cela est révolu depuis belle lurette et la moyenne CBR l’a enfin compris. Rien que le tableau de bord autorise toute l’excitation possible. Du bloc compteur triste et ringard, la 600 est passée à une dalle TFT couleur de 5 pouces semblable à celle de la CBR 1000 RR-R ; de Starfox à Star Trek. Enfin un vrai centre de contrôle avec indicateur de rapport engagé, shiftlight à 5 diodes, vitesse, régime, multiples infos et accès aux réglages des multiples assistances électroniques.
La CBR 600 RR 2024 embarque le contrôle de traction (de couple) HSTC, la gestion du frein moteur, le contrôle de wheeling, l’anti-stoppie, une centrale inertielle IMU à 6 axes et plusieurs Modes de conduite.
Ils sont cinq. Le Mode 1 est le plus sportif, le 2 est calibré pour une conduite fun, et le 3ème veut se la jouer confort. A côté d’eux, le pilote a droit à deux "User Mode" lui permettant de se calibrer ses propres stratégies. Il peut alors régler le HSTC sur 9 niveaux ou le désactiver, choisir l’arrivée de la puissance sur 5 niveaux, 3 pour le frein moteur, 3 pour le contrôle du cabrage, et encore 3 pour la gestion du shifter. L’apport de l’IMU permet l’ABS cornering et le contrôle du soulèvement de la roue arrière sur les freinages de bourrins.
Beaucoup de nouveaux contrôles dynamiques dans tout ça, tandis que la partie-cycle fait confiance dans de l’éprouvé. Elle a récupéré le matos de la génération précédente, avec un cadre périmétrique en aluminium, un gros bras oscillant renforcé - plus léger de 150 gr, des éléments de suspensions Showa réglables de partout dont la reconnue fourche inversée à gros pistons BPF, une épure de suspat’ Unit Pro-Link et des freins taxés chez Tokico. Les disques avant de 310 mm sont mordus par des pinces radiales à 4 pistons ; l’arrière, bien plus sage, n’use que d’un piston pour tempérer un disque de 220 mm. L’ensemble constitue une solution de freinage à la fois classique et efficace pour la catégorie. Mais il serait temps que Honda regarde du coté de chez Brembo. On trouve du M50 ou du Stylema même sur des trails de nos jours.
Hormis la grosse perfusion d’électronique, Honda n’a pas sorti le gros carnet de chèque pour le développement technique. Cela se voit avec une mise à jour du moteur plutôt qu’un nouveau bloc, un châssis à peine retouché (qui ne l’empêche pas d’avoir de très beaux atouts)... mais aussi sur le tarif, en chute libre. Avec l’inflation, la CBR 600 de 2017 couterait 14 300 euros aujourd’hui. Le nouveau modèle, bien mieux équipé, est présenté à 11 699 euros !
Non seulement son tarif est très bien placé, mais en euros constants, c’est la 600 CBR la moins cher de l’histoire. Une pistarde 600 pour le prix d’une 900 Bonneville, t’y crois ou bien ?
Qu’est-ce qui s’est passé !?! Ces dernières années, le marché Supersport était tellement moribond que sa disparition semblait inéluctable - seule la R6 essayait encore d’y croire, sur circuit uniquement. En 2024, spectaculaire résurrection avec le retour de la Kawa ZX-6R 636 et de la CBR 600 RR, croisant le fer avec la R6 Race. La GSX-R 600 manque au quatuor de la grande époque (elle n’a pas le droit de venir jouer en Europe). Tous ces modèles ne retrouveront pas le niveau de vente du début du siècle mais elles permettent d’accéder au sport engagé sans être obligé de passer sur des 1000 à la fois très puissantes et très cher.
Mais à force de parler de performances, d’électroniques, de winglets, de recherche & développement, de super haut-régimes et de trajectoires, on a presque oublié quelque chose d’essentiel : la majorité des sportives sont de superbes machines. Cette 600 RR en fait partie, belle et racée comme sait l’être une CBR. Et pour certains, avoir une belle moto est aussi délectable que fréquenter une magnifique compagne.
M.B - Photos constructeur
Pour les pilotes chevronnés et / ou l'engagement en championnat SuperSport, le HRC a également prévu une version "Race Base Model", préparée pour une utilisation plus radicale. Destinée exclusivement à la piste, cette CBR 600 racing perd l'accastillage routier et reçoit une ECU et un faisceau course, des disques de frein plus épais, des suspensions révisées, un contrôle de la coupure d'allumage en entrée de virage, un reparamétrage de l'injection et du ride-by-wire plus quelques pièces racing bien senties : radiateur, échappement, bougies et étriers de frein.
Plus qu'appeler le HRC pour avoir une idée du prix et de la dispo en Europe.