Fiche moto MV-Agusta800 BRUTALE 2019 Une pincée d'ivresse
Pour certains constructeurs, comme MV-Agusta, retoucher, faire évoluer ou remplacer un modèle tient de l'exercice d'équilibriste. Savoir moderniser tout en préservant les qualités et le charme. Et d'autant plus quand le modèle tient pour une part importante des ventes. Le roadster 800 Brutale est de cette veine. Prenant ces racines dans le génial coup de crayon de feu Tamburini, la "moyenne" Brutale se laisse entrainer dans un mouvement de renouveau. Tout l'art consiste à se rendre plus dynamique, plus désirable, plus saisissante. Plus MV-Agusta, en somme. Et continuer à revendiquer cette identité forte : un roadster bouillant, admiré, fatal.
Si chacun se fera son opinion, l'enthousiasme sera très majoritaire pour le design de cette 800 Butale "II". Belle, piquante, et véritablement plus incisive, la belle de Schiranna sort de l'adolescence pour devenir une belle jeune femme, osant de nouveaux habits. Elle se rapproche encore plus du sur-mesure. Bien que l'allure générale et l'analogie soient préservées, l'œil ne manquera pas d'apprécier ses formes plus séduisantes ; l'amateur éclairé sera enchanté de se concentrer sur les détails. Elément emblématique des Brutale, le phare elliptique s'offre une cercle de LEDs du plus bel effet. On sera moins convaincu par les pattes de support. Ensuite, il suffit de la parcourir doucement pour découvrir que ses jantes ont changé, que ses épaules sont bien plus dynamiques avec les nouvelles écopes, et que son arrière est devenu nettement plus aérien. La boucle arrière s'est débarrassée des supports de repose-pieds passager et du pack cligno-feu-immatriculation. Combiné à l'évidement sous la selle façon Turisme Veloce, l'assise de la Brutale est d'une pureté saisissante. Superbe !
L'accastillage évoqué plus tôt n'a pas disparu. Il a simplement migré : tous les cale-pieds sont fixés sur une platine accroché au cadre – les obligations routières arrières sont quant à elle arrimées au bout du bras oscillant.
Garde-boue avant modifié, casquette du bloc compteur revue, selle à double étage avec surpiqures, et toujours la présence du monobras et des trois flutes d'échappement, finement affûtées pour l'occasion. On est dans le beau et dans le sensuel. Si MV-Agusta a toujours une appréciation particulière de ses finances, on ne peut en revanche que s'incliner devant la maitrise du design de ses machines.
Le constructeur tente depuis longtemps les motards par son design, puis vient le moment où l'on déguste ses moteurs. De vrais purs-sangs qu'il convient d'apprécier comme il se doit : de la mécanique italienne. Emplie de caractère et de watts, avec de l'émotion plein les bielles. Sauf que là, la marque a dû composer avec des normes Euro4 assez drastique. Comment s'en sort le 3 cylindres ? Pas trop mal, et il le défend. Le couple progresse, surpassant l'ancien sur toute la plage de régime et délivrant 90% de sa force dès 3800 tr/mn.
Où le bouilleur sent ses ailes plombées, c'est du coté puissance.Depuis 2018, le haras est tombé à 110 bourrins cravachés à 11 500 tr/mn. Pour arriver ce résultat, la Brutale a dû piquer à la Turismo Veloce ses arbres à cames et ses pistons, revoir les conduits d'admission, aménagé la ligne d'échappement et augmenté le volume de la chambre de tranquillisation. Bien entendu, l'électronique est reprogrammée en conséquence.
Un constat ? Un poil moins puissante, un tantinet moins rapide, filant sous les 240 au lieu de les dépasser, mais plus disponible et plus remplie. Peu de monde se plaindra de ce lifting dynamique.
Dans la frénésie de développement des puces savantes, MV-Agusta n'est pas en reste ; loin de là. Elle continue à proposer un sérieux package, avec ABS déconnectable, Ride-by-Wire, contrôle de traction à 8 niveaux, multiples cartographies d'injection (4 dont une personnalisable*), et en bonus sur cette évolution, le shifter up&down EAS 2.0. Avec lui, la montée et la descente des rapports ne sollicite plus la main gauche. Presque de quoi oublier l'apparition d'un embrayage hydraulique.
Le tableau de bord avait aussi besoin d'être un peu rafraichi. Et pas besoin d'aller chercher bien loin : la B3 l'a tout simplement emprunté à la Rivale. Dommage que la jauge à essence soit toujours absente.
Le toucher de la route, la conduite virile, les sens aiguisés par le rythme... Une MV ne les conçoit pas comme une japonaise. C'est bien plus direct, plus singulier, pour ceux qui conçoivent que l'émotion se vit à vif. La 800 Brutale semble pourtant avoir mis un peu d'eau dans son vin. L'empattement a augmenté, passant à 1400 mm (+ 2 cm) du fait d'un angle de colonne plus ouvert. La moto devrait gagner en stabilité et se montrer un peu moins nerveuse, avec des réactions moins "brutales". La maniabilité ne devrait pas en souffrir car la hauteur de selle est relevée de 20 mm et le guidon s'élargit. Cela devrait même gommer les 8 kilos supplémentaires qu'elle embarque.
A part cela, l'ensemble du châssis est inchangé. Miss Brutale conserve sa confiance dans une fourche inversée Marzocchi de 43 mm, un cadre treillis en acier relié à de belles platines en aluminium, un amorto Sachs pour contenir les mouvements du monobras oscillant et du freinage de qualité. Deux disques de 320 mm que saisissent des tenailles radiales Brembo à 4 pistons – le disque arrière de 220 mm se contentera d'une pince à deux pistons.
Ces éléments le lui rendent bien avec une rigueur difficile à prendre en défauts ; et un confort pour les passionnés.
Il n'est pas facile de moderniser une Brutale, encore moins une MV-Agusta. La main doit être sûre et habile, le talent certain, le travail sans faute. La 800 Brutale illustre bien cet esprit, avec une série d'améliorations qui raviront les amateurs. La perte de puissance est anecdotique, et la belle s'annonce plus souple tant en mécanique qu'en conduite. Un choix de caractère.
* Plus de détails sur les quatre cartographies du système MVICS :
- Normal : le plus apte au quotidien, avec 90 chevaux sous la main.
- Sport : le moteur libère ses 116 chevaux avec une réponse plus directe.
- Rain : la puissance est ramenée à 80 chevaux.
- Custom : permet au pilote de définir les paramètres fondamentaux tels que la réponse du moteur, le limiteur de régime, la réponse du couple moteur, la sensibilité de la commande des gaz et le frein moteur.
La Brutale s'ouvre à la catégorie A2. Pour pouvoir être bridée à 47,5 chevaux, une version spécifique du roadster sera cartogaphiée en 70 kW, soit 95 chevaux.
M.B - médias constructeur