Fiche moto Norton961 Dominator 2017 Une piqure de route

Norton a réussi un élégant retour aux affaires avec sa 961 Commando. De la classe, du frisson nostalgique, une ligne pure et fatale. Et pourtant, la marque aspire à plus d'émotions, à des sensations plus brutes, plus authentiques, plus sportives. Aussi a-t-elle décidé de faire revivre un de ses modèles les plus célèbres, la Dominator. Apparue en 1949, cette moto a inauguré la motorisation bicylindre chez le constructeur anglais. Aujourd'hui, nimbée d'un esprit café-racer perfusée à l'essentiel minimaliste, ce roadster vient taquiner les passionnés de machines rebelles au goût sec et puissant.
Une 'sportive' à l'ancienne, qui vous met en contact direct avec la virilité mécanique. La Dominator est exigeante, sans sucre et sans détour. Mais quelle superbe ! Très compacte, sans fioriture, menaçante, cette Norton est fière de sa silhouette nerveuse et furieuse. Tel un guerrier sans peau ni graisse, aux muscles métallisés. Chaque pièce est utile, chacune va à l'essentiel. Ce 'street racer' n'a qu'une envie : le plaisir du pilotage. Mais pas celui pour démonter une pendule sur circuit avec une hypersport de 200 bourrins. Non, celui qui vous prend aux tripes, qui vous intime d'aller plus vite au virage suivant, qui vous emmène dans une dimension du plaisir viscérale. Prenez le temps d'admirer la bête. Avec ses jantes à rayons largement masqués par son système de freinage Brembo, des disques de 320 mm avec des étriers radiaux à pistons. Sa belle fourche Öhlins Black-Line de 43 mm au comportement rigoureux. En duo avec l'amortisseur Öhlins TTX36, les suspensions sont annoncées fermes, éprouvantes sur les routes du quotidien mais saisissantes d'efficacité quand le bitume se montre à la hauteur.
Dérivé de la 961 Commando, la Dominator bénéficie toutefois d'un châssis revu. Le cadre est modifié dans sa partie arrière et plus rentré au niveau de la colonne de direction. Un bras oscillant spécifique en tubes d'acier assure encore le coté exclusif de cette machine. Le pilote ne prendra conscience de la délicieuse amertume de cette machine qu'un montant à bord.
Ce n'est qu'ici, sur la tranche de pain de mie qu'est la selle, que le veinard proprio pourra vraiment apprécier le confort spartiate offert par la belle anglaise. Le double compteur à aiguilles est des plus charmants, obligatoirement vintage. Ce n'est pas le plus important pour piloter. Il faut d'abord aller chercher les guidons-bracelets pour mettre le corps en position d'attaque et d'incommodité. Les bras souffriront en promenade, le rayon de braquage ridicule vous fera réfléchir à chaque manœuvre et demi-tour ; alors que l'alliance du corps et de la machine prendra tout son sens quand la route tournera encore et encore. Vous êtes prêt ?
Alors démarrez ! Le bicylindre parallèle semble sorti du passé, du temps où les Norton fraternisaient de guerre avec les Triumph. Pris lui aussi sur la Commando, le 961 cm3 n'a subi aucun changement. Il distille un plaisir tout en vibrations, au tempo de 80 chevaux. La puissance n'est pas l'essentiel. L'intérêt de cette mécanique, c'est son caractère. L'absolu n'est pas dans les tours mais dans les mi-régimes. Il faut savoir le savourer, puis poursuivre le tempérament de la moto à être délicieusement vorace d'intrépidité.
De belles pièces, on en a vu sur le châssis. Et pas que. Le carbone sait se faire beau, occupant les postes de garde-boues, caches de boite à air, saute-vent et coque arrière. Cet élément de poupe est ici un moment d'insolence admirable, raccourcissant aux limites du raisonnable la section arrière de la Dominator – plus court et on s'assoit sur la roue. De l'alu, de l'inox, des pièces polies, un superbe réservoir qu'on exposerait tel un buste de Rodin, la moto flirte avec l'exigence. Dommage que certains éléments soit d'un gabarit bien inférieur, tels les rétros quelconques ou les clignos à deux balles.
Petit joyau à la saveur typiquement anglaise, la Norton Dominator fait partie de ses motos au comportement bien trempé, au charme ravageur et à l'accessibilité élitiste. Son prix, son confort relatif et son utilisation la réservent à une catégorie de motards très spécifique. De ceux qui mâchent de l'acier au ptit déj – pas pour épater les copains mais pour mordre la route à pleines dents et sans édulcorants.
M.B - Photos constructeur


