Fiche moto Moto-GuzziV 85 TT 2024 Les chemins décalés
Depuis 15 ans, les projecteurs sont braqués sur les gros trail-GT. Voyageurs, surpuissants, ultra-équipés technologiquement, ils sont devenus les stars du monde moto. Et comme pour le show-business, ils rayonnent d’opulence… avec une distorsion plus ou moins marquée avec les réalités du motard lambda.
Et puis, il y a le V85 TT de Guzzi. Un trail relativement modeste en puissance, classé chez les mid-size, au physique déroutant et charmeur. Ni un avion de chasse, ni un conquérant de l’extrême, encore moins une moto qui se la pète façon Deadpool, il fait pourtant un excellent parcours : c’est le modèle qui cartonne le plus chez le constructeur, représentant plus d’1/3 de ses ventes. De plus, il accumule les compliments de la part des médias comme des utilisateurs.
Bref, une machine réussie ; qui ne demande qu’à progresser dans la présente et sérieuse évolution. Surtout pour un agrément de conduite supérieur. C’est principalement dans le moteur que cela se joue. Mais avant de rentrer dans les entrailles du sujet, voyons comment la V85 TT aborde son nouvel épisode.
Avec extravagance et discrétion. Antinomique, n’est-ce pas !?! Depuis ses débuts, le V85 propose couleurs discrètes ou déco pétantes. Cette fois, ce ne sont que des robes percutantes, dignes de bécanes de sport. Mais sous l’habit, le dessin est plus timide. Les lignes de la Guzzi n’ont quasiment pas changé. Toujours ce double regard globuleux, ses formes néo-rétros, ce réservoir aux joues protubérantes et cette ligne davantage burinée que façonnée. Un œil attentif est nécessaire pour découvrir de nouvelles arcades de phares et l’ensemble porte-paquet / poignées passager réalisées en aluminium moulé sous pression. Les panneaux sous la selle différemment légèrement, ainsi que les anses du sabot moteur.
L’attention peut maintenant se déporter sur les couvre-culasses, restylisés, accompagnant la volonté d’une allégresse nouvelle. Tout se passe au centre du V. Moto-Guzzi donne au twin le renfort d’une distribution variable – un choix audacieux pour une mécanique aux valeurs d’antan (refroidi par air, culbuté, 2 soupapes par cylindre) mais payant. Cela apportera plus de consistance dans les bas et mi-régimes tout en gardant de la force pour le haut du compte tours.
Concrètement, comment ça se passe. A l’extrémité de l’arbre à cames, un mécanisme contient 6 billes encastrées dans des pistes inclinées. En progressant dans les tours, la force centrifuge va pousser les billes vers le bord des cannelures et décaler l’arbre à partir de 6 500 tr/mn pour le faire varier de 7°.
Sur le papier, le couple n’a progressé que de 1 Nm, avec un maxi à 83 Nm / 8,5 mkg obtenus à 5 100 trs. Sauf que ce couple serait bien plus présent à partir de 3 000 trs. Comme avant, 90% de sa valeur sera déjà dispo assez tôt, à partir de 3 500 trs (3 750 sur le modèle précédent). Une force bienvenue pour les régimes les plus usuels. Plus haut, la V 85 TT laissera s’exprimera son regain de puissance, celle-ci augmentant à 80 chevaux lors des 7 750 trs – 4 chevaux de plus ; et accessoirement la même valeur que la première V85.
En plus de rendre son moteur plus élastique, Mandello a également introduit des capteurs de cliquetis pour mieux synchroniser l’allumage et une troisième sonde lambda pour se préparer à Euro5+.
En parallèle de cette évo de la V85, Guzzi sort une déclinaison Strada, plus urbaine et routière. Du coup, la TT s’oriente vers une définition du confort plus marqué. Les protège-mains ont grossi, et le pare-brise a gagné en hauteur tout en se laissant pousser les bords. La pression d’air en diminuerait de 37%. Plus d’aisance est également prévue pour l’interface de bord, avec un écran TFT couleur plus grand, taillant 5 pouces, et de nouveaux commodos. On appréciera aussi l’apparition d’une molette sur l’amortisseur arrière pour régler plus facilement la précharge.
Depuis ses débuts, la V85 TT se montre raisonnablement équipée en électronique, loin du matos interstellaire des gros SUV. Outre la dalle TFT, ce trail embarque un contrôle de traction, 4 Modes de conduite (Road, Sport, Rain, Off-Road), un régulateur de vitesse, l’ABS, un port USB - et la plate-forme multimédia MIA (pour connecter le smartphone) en option. Si la nouvelle version a perdu le Mode de conduite Custom (personnalisable), elle a en revanche gagné une centrale inertielle à 6 axes. Ce qui permet une sensibilité à l’angle pour l’ABS et le contrôle de traction. Est-ce que ce trail de 80 bourrins avait besoin d’une gestion avancée de sa motricité et de son freinage…. ? A chacun d’apprécier.
Ce que tout le monde louera en revanche, ce sont les freins, les vrais freins ; ceux en métal et qui mordent. Les V 85 emportent les mêmes Brembo depuis le début de son histoire. Des étriers monoblocs radiaux avec 4 pistons, agissant sur de grands disques de 320 mm. Leur efficacité est avérée, plaisante, permettant des performances de freinage de premier ordre. Pour l’arrière, ce sera 260 mm de disque et un étrier à 2 pistons.
La V85 TT maintient également le statut quo pour son châssis. Quelqu’un avait-il quelque chose à lui reprocher ? Pas grand-monde, sauf ceux qui voulaient s’aventurer dans du gros off-road. Mais le V85 TT n’a jamais voulu aller aussi loin. Ses 170 mm de débattement de suspension, Ses jantes à rayons de 19 et 17 pouces, ses pneus mixtes et son poids de 230 kg sont d’accord pour de petites escapades mais sans exagérer. Pour les autres usages, la Guzzi a toujours été un réel plaisir ; cette évolution ne pourrait faire le contraire.
C’est une parfaite continuité pour la V85 TT : un design inchangé, de petites améliorations pour le confort, un moteur enrichi en technologie et des assistances au pilotage plus sensibles. Tout ce qui plait en lui est conservé, et c’est bien là l’essentiel. Par contre, son tarif a pris une claque. Ce qui laisse naturellement de la place pour la version Strada, destinée à ceux faisant fi des chemins et prêts à renier sur une série de commodités. A l’opposé, le modèle Travel se prend des airs de GT.
M.B. - Photos constructeur