Trois crocs dans la gorge
Ne vous y trompez pas, cette Tiger 900 n'est que l'arbre qui cache la forêt. Une pépinière de déclinaisons afin de satisfaire toutes les envies des amateurs de trails. Sauce anglaise évidemment. Plus qu'une mise à jour, c'est une large refonte qui permet à la Triumph de consolider ses acquis, d'affirmer un potentiel revu à la hausse et de grogner sur la concurrence.
C'est aussi l'occasion de se débarrasser des noms codés qui accompagnaient chaque version. Entre XR, XC, XCx, XYoupi et DBZ, c'était un peu galère de simplement saisir les différences entre chaque. A présent, on pige assez vite qui de GT, GT Pro, Rally ou Rally Pro peut présenter les capacités aptes à séduire. Sauf pour ceux à la recherche d'un trail routier au plus simple. On commence donc par le plus accessible, le modèle de base de la famille. Mais bien que Triumph présente ainsi son 900 Tiger sans adjectif qualificatif, il est loin d'être basique.
Tout s'apparente à une histoire d'évolution, de toujours plus. Comme si le décalage vers le haut ne pouvait souffrir d'aucun répit. Un mot que la Tiger se refuse à imaginer. Tout comme son 3 cylindres. Cela faisait-il trop longtemps qu'il vivait dans ses 800 cm3 ? Ne provoquait-il plus d'enthousiasme ? Rien de tout cela, sauf qu'il est temps de passer à autre chose. Une pincée d'alésage supplémentaire, presque 4 mm, et voila que la cylindrée grimpe à 888 cm3 – d'où la nouvelle appellation de 900. Un bon moyen de passer Euro5 sans trop s'étouffer. Cependant, ne vous fiez pas tout de suite à la puissance présentée. Hier en 800, aujourd'hui en 900, la Tiger de moyenne cylindrée crache les mêmes 95 chevaux.
Vrai, et faux. Cette puissance maxi est dispo plus tôt, 750 tr/mn en avance sur le compte-tours. Le couple se présente comme le principal gagnant, avec presque 1 mkg de gagné. De 79 Nm à 8 050 tr/mn, le trois-pattes progresse à 87 Nm. Obtenus à un régime abaissé de 800 trs. Du tout bon pour muscler les reprises et la disponibilité du bloc. Malgrè ses 70 Kw, cette Tiger n'est pas bridable en A2 - Triumph a préféré proposer cette possibilité aux modèles plus hauts dans la gamme.
Le moteur des 800 Tiger leur allait fort bien. Hinckley a cependant jugé qu'un peu plus de caractère ne lui ferait pas de mal. De concert avec sa poussée de fièvre, il change de séquence d'allumage avec une partition en 1 - 3 - 2. Un son plus présent, davantage de retours en sensations et une disponibilité accrue sont les bienfaits attendus.
Outre les nouvelles pièces internes au moteur, Triumph en a profité pour changer la boite à air, revoir les radiateurs et avancer le propulseur dans le cadre.
Elle est fière, et elle le montre. Son regard a énormément froncé pendant que son buste gagne en dynamisme. Une nouvelle signature LED affiche la rixe. Dessous, un bec de canard inhérent à la catégorie prend sa place sur toutes les versions, alors qu'il était réduit à une insidieuse présence sur les versions routières XR & co des Tiger 800. Le pilote aura le buste légèrement redressé, le guidon ayant été reculé de 10 mm. La selle est un peu moins large, facilitant la pose des pieds au sol.
Comme c'est une entrée de gamme, ce Tigre se tempère sur la prestance afin d'orienter l'intéressé vers des versions plus huppées, plus riches, plus chers. Il fait donc l'impasse sur des suspensions sophistiquées (seule la précharge de l'amorto est réglable), l'ABS n'est pas cornering, on oublie les protège-mains et le choix des coloris est réduit. Pour ne pas dire unique.
Ce trail Triumph est pourtant loin d'être moribond. Non seulement c'est le plus léger de la fratrie, mais il embarque quand même deux Modes de conduite (Rain et Road), un contrôle de traction, un écran TFT couleur de 5 pouces (7 sur les autres Tiger 900), une selle réglable en hauteur, un éclairage entièrement à LEDs, un embrayage assisté, des éléments Marzocchi dont une fourche inversée de 45 mm et des étriers Brembo Stylema. Un matos de freinage exceptionnel pour ce genre d'engin.
La Triumph 900 Tiger arbore une nouvelle identité, un moteur revisité pour plus de caractère et d'efficacité ainsi que tout un tas de sucreries. Qu'elle a pris soin de réserver en grande partie à ses frangines de plus forte facture. Le nom semble provenir de la T430 du XXème siècle alors que la moto rentre de pleine jante dans la troisième décennie du millenium. Avec conviction.
M.B - Photos constructeur