Fiche moto Bimota1000 Tera 2024 Allroader high-tech
Un trail chez Bimota ? Fait surprenant et quasi illusoire mais pourquoi pas. Il y a bien un crossover chez Ferrari, le Purosangue. Le petit et prestigieux constructeur italien a fait de la surprise et du raffinement sa marque de fabrique. On ne compte plus ses machines qui nous ont épaté, séduit ou estomaqué (Tesi 1D, 1100 SB6, 500 V-Due, 800 Tesi 3D RaceCafé, DB8 Oronero, etc...).
Il ne serait en autre autrement avec la 1000 Tera. Une moto surprenante dans tous les sens, aussi bien pour sa présence chez une marque à l’âme très sportive que par ses solutions techniques. Quant à sa dénomination trail, personne n’est leurré. Un tel engin ne mettra jamais ses roues sur le moindre centimètre de terre. Mais le segment “aventure” est le très porteur actuellement. Il est donc le plus indiqué pour se montrer et orienter les spotlights sur ses créations.
La Tera combine tout ce que l’on attend d’une Bimota : un design extravagant, un châssis étonnant, un moteur plus que performant. A cela s’ajoute la dimension d’un SUV. Donc une position plus droite, un aspect massif et une relative orientation vers le tourisme. Bimota avait bien tenté une approche du voyage avec la chimère DB 12 B Tourist mais le projet est parti avec les tourments de la marque à l’époque.
Plus massive qu’orgueilleuse, la Tera prend sa place et ses aises. Le dessin n’a pas la finesse ni la légèreté d’une MV-Agusta 800 Turismo Veloce. L’école italienne du design nous a habitués à plus délicat. De fait, elle rentre dans les canons du segment, avec en surcouche un nuancier Tricolore plaisant ou un manteau sable & biscuit très baroudeur. C’est après que la Bimota dévoile ses atouts et ses fantasmes.
Pour le squelette de ce SUV, la marque italienne a choisi un tout nouveau cadre, nativement dérivé de la Tesi H2et toujours très spectaculaire. La technologie TEra, qui donne son nom à la moto, signifie TEsi Regolazione dell’Altezza - TEsi avec réglage de la hauteur, en français ; ou techno-commercialement Tesi Height Adjustment System. Avec cette partie-cycle, la Bimota peut faire varier sa hauteur sur 30 mm.
Le train avant type Tesi se constitue toujours d’un bras oscillant avec moyeu directeur fixé sur de fortes platines en aluminium servant de cadre. Mais la triangulation basse a été simplifiée tandis qu’un complexe jeu de biellettes permet de faire travailler l’amortisseur avant avec un sous-châssis tubulaire en acier. Avec cette conception, les fonctions de guidage, d’amortissement et de freinage sont indépendantes les unes des autres et travaillent sans se parasiter entre elles.
En bonus, cette évolution a permis de gagner 8° d’angle de braquage, pour un total de 35° - ce que propose une Ducati Monster mais y a encore un peu de boulot à faire. Une Africa Twin, par exemple, braque sur 43°.
Vu le positionnement de Bimota, seules des suspensions haut de gamme peuvent prendre place à bord. Pas de fourche pour la Tera mais deux amortisseurs Öhlins, totalement réglables et disposant d’un débattement de 114 mm à l’avant et 135 mm à l’arrière. En option, il est possible de remplacer les éléments suédois par un ensemble Marzocchi électronique semi-actif, avec des débattements augmentés (145 mm / 165 mm).
Le freinage est confié à Brembo, avec des étriers Stylema à 4 pistons sur des disques de 330 mm. Du matos niveau hypersport, fixé d’une manière très particulière vu la structure du train avant. Ajoutez à ça des pneus mixtes sur des jantes à bâtons de 17 pouces et vous obtenez la plus singulière des solutions pour une moto de route.
Saisissant de technique pour sa partie-cycle, la Tera l’est presque autant avec son moteur. Les chiffres sont effrayants : 200 chevaux ! Délirant, effrayant, suggestif !
Son bloc est connu car il s’est déjà exercé dans plusieurs motos mais il était hautement improbable de le trouver un jour dans un trail. De qui s’agit-il ? Vertigineusement du 4-cylindres à compresseur de la famille Kawasaki H2 (roadster Z H2, sport-GT H2 SX, anciennement sportive H2). On avait cru à la folie quand Ducati sorti sa Multistrada de 150 chevaux... On pensait être allé trop loin avec les 170 chevaux de la S 1000 XR alors que dans le même temps Ducati dégainait la MTS V4 RS de 180 bourrins... Mais toutes les limites sautent, comme le prouve la M 1000 XR et ses 201 chevaux. La Bimota est encore plus dingue avec ses 200 canassons – OK, une cuillère à café de puissance en moins, mais le compresseur apporte une telle patate au moulin que les sensations et l’arrivée de la puissance sont d’une autre dimension. L'Italo-japonaise est aussi bien plus généreuse en couple, avec 14 mkg.
Ce moteur est déjà implanté depuis quelques temps chez le constructeur de Rimini, pour propulser sa Tesi H2. Sa cartographie a été adaptée pour le maxi-trail : moins puissant que dans la sportive, il se targue en revanche d’une meilleure disponibilité. La puissance maxi est là 500 tr/mn plus tôt. Le couple maxi est bien plus révélateur, ses 137 Nm étant atteint à 8 500 trs au lieu de 11 000 trs. La moto n’aura rien à envier à des machines plus racées qu’elle. Elle peut claquer le 0 à 100 en 3,5 secondes. De l’arrêt jusqu’à 200 km/h, seulement 8,2 secondes seront nécessaires.
Grâce au soutien massif de Kawasaki, le Tera profite non seulement du redoutable moteur à compresseur mais aussi de l’électronique maison. Sa conduite sera ainsi épaulée par le système de surveillance en virage KCMF, des contrôles de traction et de départ arrêté, un régulateur de vitesse, un shifter et un ABS actif en courbe. L’instrumentation est confiée à une dalle TFT couleur de 4,3 pouces.
Dommage que les commodos et les leviers soient aussi issus de la gamme Kawa. Qu’ils eussent été de bon ton des commandes plus chiadées, plus glamour, genre taillées dans la masse.
Comprenons les choses de façon empirique, jusqu’à fantasmagorique. Faut être complètement taré pour proposer un trail motorisé par un baril de poudre enrichi au plutonium ; et c’est le top de mettre en vente libre un truc pareil. Non pas pour l’utilisation ou la pertinence de l’engin mais pour la richesse du concept et le cocktail technique. La Tera est aux antipodes de THX 1138, à la recherche d’une liberté qu’elle seule peut comprendre. Hors de question de parler du prix, même si l’on doit s’attendre à une belle baffe.
M.B - Photos constructeur
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